Pourquoi la retraite à taux plein n’est pas forcément le graal ?

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Partir avec le taux plein : pour nombre de futurs retraités, c’est l’objectif ultime pour s’assurer une retraite confortable. Étant donné qu’une fois qu’il est calculé, le montant de la pension de retraite est figé à vie, il paraît effectivement normal de vouloir partir en retraite avec le plus d’argent possible. Le taux plein correspond ainsi à la retraite maximale qu’il est possible d’avoir.

Pour autant, préparer sa retraite en se concentrant uniquement sur l’obtention du taux plein serait une erreur. Contrairement à une idée reçue, le taux plein est avant tout un repère administratif, pas forcément synonyme d’une pension plus élevée. Explications.

Retraite : déconstruire le mythe du taux plein

Selon la DREES, 89% des assurés de la génération 1953 ont liquidé leur retraite au taux plein en 2020. Le « taux plein » correspond à une pension de base sans décote (c’est-à-dire sans minoration pour insuffisance de durée cotisée), dès lors que l’assuré a rempli les conditions d’âge ou de trimestres.

Ce taux plein est obtenu si vous avez cotisé un certain nombre de trimestres et que vous atteignez l’âge requis, selon votre année de naissance.

À défaut, tout le monde peut obtenir le taux plein en travaillant jusqu’à 67 ans, l’âge automatique du taux plein, indépendamment du nombre de trimestres validés.

ATTENTION

Partir avec le taux plein ne signifie pas partir avec une pension équivalente à ses derniers salaires ! En ce qui concerne la retraite de base de salarié, au maximum, le taux plein vous permettra d’avoir la moitié de votre revenu annuel moyen (calculé sur vos 25 meilleures années), à condition que vous ayez acquis tous les trimestres requis pour votre génération. Mais attention, ce revenu annuel moyen est plafonné au PASS, le plafond annuel de la Sécurité sociale. Cela signifie que même si vous gagnez très bien votre vie, avec par exemple un salaire de 10 000 €/mois en 2025, au maximum votre retraite de base correspondra à 50% du PASS mensuel, soit 1962,50 € en 2025.



À ce montant s’ajoute ensuite la pension de retraite complémentaire, dont le calcul repose lui sur un système de points. Cette dernière s’élevait en moyenne à 464 euros en 2023, tandis que les plus hauts revenus pouvaient espérer 1246 euros (étude Agirc-Arrco).

Notons par ailleurs que le revenu annuel moyen dépend directement de vos salaires passés. Si vos revenus ont été modérés, votre pension à taux plein le sera aussi. Ainsi, le taux plein correspond à un coefficient de calcul, non à un plafond garanti de niveau de vie.

Taux plein ≠ Taux maximum : attention aux nombres de trimestres !

Il est possible d’avoir une retraite à taux plein… Sans avoir une retraite au taux maximum possible. Comme vu précédemment, le montant de votre retraite de base dépend non seulement de vos 25 meilleures années de salaire, mais aussi de votre nombre de trimestres validés auprès de l’Assurance retraite.

EXEMPLE

  • Si vous partez à la retraite avant 67 ans, avec le nombre de trimestres qui vous est demandé (par exemple 170), votre retraite sera égale à :

    Salaire annuel brut moyen x 50 %x 170 / 170

    > Vous avez non seulement le taux plein, mais aussi le taux maximum possible.
  • En revanche, si vous partez à la retraite à 67 ans avec moins de trimestres que ce qui vous est demandé, par exemple 162 au lieu de 170, votre retraite sera égale à :
    Salaire annuel brut moyen x 50 %x 162 / 170

    > Vous aurez bien le taux plein (50%), sans décote, mais vous ne toucherez pas le montant maximum possible puisqu’il vous manquera tout de même des trimestres.

Les limites du taux plein : pourquoi ce repère administratif ne suffit pas

Pour toutes ces raisons, valider le taux plein ne fera pas automatiquement et forcément augmenter de façon significative le montant de la pension. L’effet marginal de quelques trimestres supplémentaires peut être très limité. En d’autres termes, passer de, disons, 168 à 172 trimestres peut n’apporter que quelques euros de plus selon votre moyenne de revenus et l’âge de départ. Sans compter qu’avoir le taux plein pour sa retraite de base ne garantit pas non plus d’avoir une retraite complémentaire pleine, puisque les règle de calcul sont différentes.

Les différentes évolutions législatives (relèvement de l’âge de départ et du nombre de trimestres à valider) signifient par ailleurs qu’atteindre le taux plein pour les plus jeunes générations nécessite plus d’annuités (172 trimestres pour les générations nées après 1965).

Viser le taux plein reste un objectif utile, mais il ne signifie pas « optimiser » sa retraite, sans une analyse rigoureuse de son relevé de carrière, de ses sources de revenus et de l’âge de départ souhaité.

Au-delà du taux plein : les vrais enjeux stratégiques pour les futurs retraités

Pour bien préparer votre départ, il ne suffit pas de viser « le taux plein ». Voici les autres leviers stratégiques à explorer.

Mesurer l’impact d’un report de départ ou d’un départ anticipé (décote vs taux plein)

  • Si vous partez sans avoir le nombre de trimestres requis et avant l’âge du taux plein automatique, une décote définitive s’applique à votre taux de liquidation. Par exemple, -1,25 % par trimestre manquant (selon génération) dans le régime général.
  • En revanche, travailler plus longtemps (ou partir plus tard) peut permettre de bénéficier du taux plein ou même d’une surcote (majoration de pension) de +1,25% si vous dépassez la durée requise.

Il convient donc de comparer : partir tôt sans tous ses trimestres (avec décote) vs différer le départ pour valider plus de trimestres et avoir de meilleurs revenus.

Ce calcul dépend de : votre espérance de vie, l’évolution de vos revenus, votre situation matrimoniale, votre santé, etc. Mais ce n’est qu’en mesurant concrètement ce que cela vous coûterait que vous pourrez faire votre choix.

Mesurer l’intérêt réel du taux plein selon votre situation… Et envisager d’autres options

Si vous avez déjà une carrière complète, un bon niveau de revenus et vous avez validé presque tous vos trimestres, viser le taux plein a du sens.

En revanche, si vos revenus ont été faibles (études longues, temps partiel, interruptions) ou s’il vous manque beaucoup de trimestres, l’atteinte du taux plein pourrait être moins rentable que :

  • Faire attention à la date de départ en retraite : pour que le revenu d’activité de l’année de votre départ soit pris en compte, il peut être intéressant de différer votre départ au 1er janvier de l’année suivante.
  • Racheter des trimestres (par exemple, années d’études supérieures non cotisées) peut être une option pour atteindre le seuil du taux plein ou éviter une forte décote.
  • Vérifier votre éligibilité à des dispositifs spécifiques (carrières longues, pénibilité)
  • Opter pour une retraite progressive : ce dispositif permet de réduire son activité tout en commençant à percevoir une partie de la pension, ce qui permet d’amortir la transition et d’améliorer la durée ou les revenus sans basculer complètement dans la retraite.
  • Faire du cumul emploi-retraite : après liquidation de votre retraite, vous pouvez reprendre une activité (sous certaines conditions) et ainsi augmenter vos revenus. Attention cependant, il est possible que le CER soit prochainement réformé, ce qui le rendrait moins intéressant avant 67 ans.

En résumé : la vraie préoccupation d’un retraité ne doit pas seulement être « d’atteindre le taux plein », mais plutôt : « quelle pension vais-je percevoir en fonction de ma carrière, de mon âge de départ, et quelles sont les options à ma disposition pour optimiser cette pension ». Il est donc erroné de croire que « avoir le taux plein » suffit à assurer une retraite confortable, il s’agit plutôt d’un levier, à considérer dans une stratégie plus globale.

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