J’ai bien mangé, j’ai trop bu, j’ai ma prévoyance qui est exclue

Un bon repas bien accompagné de bons vins, Alain dit rarement non. Artisan ferronnier en zone rurale, il aime aussi partager quelques moments conviviaux avec ses clients.
Alain est marié et père de trois enfants. Avec son épouse Michèle, ils ont acheté il y a 4 ans une belle propriété à l’aide d’un emprunt. L’activité marche bien dans son domaine compte tenu des belles demeures dans la région.
Un dernier verre de trop pour la route glissante
Un soir de décembre. Alain termine l’apéritif chez un ami. Un verre, deux verres, trois verres, et plus. Il fait nuit, il a énormément plu pendant deux jours. La température baisse, les voies sont glissantes. Voulant rentrer chez lui le plus vite possible, Alain roule un peu au-delà des limites de vitesse. Il n’y a personne, sauf un animal qui traverse – un chevreuil – ils sont nombreux en cette période de chasse.
Alain se réveille à l’hôpital, quelques heures plus tard, endolori mais vivant. Son épouse est à ses côtés. Elle lui apprend qu’il a perdu le contrôle de son véhicule qui est allé s’encastrer dans un arbre.
Le diagnostic n’est guère brillant. Sur le plan moteur, les médecins ne cachent pas leur pessimisme. Alain va garder d’importantes séquelles. Il est reconnu en état d’invalidité totale et définitive.
Michèle est obligée de faire les comptes. Alain touchera de son régime de base 50 % de ses revenus, soit environ 1 600 euros par mois dans la mesure où le montant de la pension ne peut être supérieur à 50 % du Plafond annuel de la Sécurité sociale. A cela devrait s’ajouter une majoration pour l’aide constante d’une tierce personne pour effectuer les actes de la vie courante d’environ 1 100 euros mensuels.
Exclusions des garanties emprunteur et Madelin en cas d’alcoolémie
Michèle et Alain comptent bien sur leurs assurances complémentaires pour améliorer leur ordinaire.
En premier lieu, leur assurance emprunteur pour effacer leur endettement sur les 16 prochaines années.
En second lieu, leur contrat de prévoyance Madelin pour obtenir une rente invalidité supplémentaire.
Mais le choc sera rude. Ni l’une ni l’autre ne veulent prendre en charge les prestations au motif qu’Alain, qui n’a causé aucun préjudice à un tiers mais s’est mutilé lui-même, conduisait sous l’emprise de l’alcool ou plus exactement sous l’emprise d’un taux d’alcoolémie supérieur aux limites légales.
Avec son ami Jean, avocat, Michèle épluche les conditions générales des contrats.
Dans le premier, l’assurance emprunteur, elle lit que « ne donnent pas lieu au versement des prestations d’incapacité de travail et d’invalidité, les conséquences du sinistre qui survient alors que l’assuré présente un taux d’alcoolémie supérieur au taux prévu par l’article L 234-1 du Code de la route et relevant des délits ».
Dans, le second, le contrat Madelin elle découvre que l’assureur « ne garantit pas les arrêts de travail, l’invalidité et le décès des conséquences des accidents dans lesquels l’assuré se trouve en état d’ivresse manifeste ou sous l’emprise d’un état alcoolique constaté par un taux d’alcoolémie pour lequel un conducteur pourrait faire l’objet d’une sanction pénale. »
Est-ce que nous pouvons nous opposer à ces refus de prise en charge, même s’ils sont prévus aux contrats demande Michèle à Jean ?
« L’assureur peut refuser l’indemnisation en cas de conduite sous l’emprise d’un état alcoolique qui dépasse le seuil réglementaire. L’assureur doit toutefois prouver les liens entre le taux d’alcoolémie et le sinistre. Lorsque ce n’est pas le cas, il peut se retrouver condamné à indemniser les victimes.
Il est possible d’intenter une action, mais dans le cas présent le résultat final est loin d’être garanti », explique Jean, un peu désemparé.
Morale de l'histoire
ALCOOL DANS LE SANG, PRÉVOYANCE QUI LÈVE LE CAMP