La Cour des comptes préconise un rapprochement de la MSA vers le régime général

Performances et réformes insuffisantes, activité fragmentée en un trop grand nombre de caisses … une nouvelle enquête de la Cour des comptes met en évidence les multiples difficultés de gestion de la Mutualité sociale agricole (MSA). Les sages de la rue de Cambon, qui soulignent que « les spécificités de la MSA perdent de leur substance et justifient de moins en moins une gouvernance atypique et peu adaptée à des évolutions indispensables dans l’organisation des activités du régime agricole » prônent un rapprochement de la MSA vers le Régime général.
« Un régime particulier de Sécurité sociale en déclin structurel »
Le régime agricole couvre des non-salariés, comme les exploitants agricoles, mais également des salariés agricoles. Par rapport au régime général des salariés, la MSA a pour principale spécificité le « guichet unique », à savoir la gestion par une seule institution de l’ensemble de la protection sociale de ses affiliés.
À ce titre, elle verse les prestations de base de l’ensemble des risques couverts par la sécurité sociale, la retraite complémentaire obligatoire des exploitants et les prestations de solidarité pour le compte de l’État. En outre, elle recouvre l’ensemble des prélèvements sociaux. La Cour des comptes reconnaît sur ce point la praticité de ce guichet unique pour les ressortissants du régime agricole.
Cependant, le rapport pointe du doigt le déclin démographique de la MSA (qui perd des assurés chaque année), et l’augmentation des salariés parmi les ressortissants du régime agricole, qui « n’est pas sans conséquence sur la justification d’un régime autonome de Sécurité sociale ».
Ce déclin entraîne le fait que le régime agricole de sécurité sociale est le principal bénéficiaire de la solidarité nationale (affectation d’impôts et de taxes, compensation démographique généralisée pour les retraites, transferts d’équilibrage des branches du régime général) : Ainsi, en 2018, les ressources issues de la solidarité nationale représentaient 40,6 % de celles du régime des salariés, et 83,1 % de celle du régime des exploitants.
« Une gestion insuffisamment performante »
Avec 10 % environ des agents du régime général, la MSA a versé en 2018 l’équivalent de 7,2 % des prestations versées par les branches du régime général et mis en recouvrement l’équivalent de 4,3 % des prélèvements sociaux collectés par les URSSAF. Pour la Cour des comptes, cela traduit :
- Une organisation fragmentée des activités entre un grand nombre de caisses locales et, plus encore, de sites de production
- Des moyens insuffisamment corrélés à la baisse de la charge d’activité, un pilotage à renforcer : « la gestion des moyens du régime se caractérise par un dialogue insuffisant entre la caisse centrale et les caisses locales », estime la Cour des comptes. « Pour l’essentiel, les plafonds d’effectifs et de dépenses de gestion courante sont répartis entre les caisses de manière paramétrique. Sans comptabilité analytique, ni instruments de mesure de la charge d’activité adaptés aux enjeux, la caisse centrale de la MSA est dépourvue des outils à même d’assurer une bonne adéquation des moyens accordés à l’activité de chacune des caisses », regrettent les sages.
- Des résultats très inégaux et souvent insatisfaisants dans l’exercice des missions : « le recouvrement des prélèvements sociaux (16,3 Md€) est le principal point noir de la gestion opérationnelle de la MSA, avec des taux de restes à recouvrer de 6,4 % et de 2 % sur les flux de prélèvements sociaux respectifs des non-salariés et des employeurs de salariés en 2018 », une conséquence des difficultés économiques de certains secteurs d’activité, souligne la Cour des comptes.
« Des évolutions à inscrire dans le cadre des réformes de la protection sociale »
Les constats établis par la Cour des comptes démontrent qu’au-delà de difficultés conjoncturelles, la MSA connaît des handicaps structurels, dus à la fois par le déclin de la population des ressortissants du régime agricole, et de profondes transformations de l’organisation de la protection sociale, marquée par une concentration croissante de cette dernière autour du régime général. « Cette situation suppose de pouvoir s’affranchir du statu quo institutionnel pour engager les réformes nécessaires et établir des perspectives d’avenir ».
Face à ces constats, la Cour des comptes recommande à la MSA :
- D’exercer plus efficacement les missions du régime de Sécurité sociale
- Réexaminer le champ et préciser le cadre juridique des activités distinctes du régime de Sécurité sociale
- Réformer la gouvernance du régime agricole
- Développer les synergies avec le régime général de la Sécurité sociale
- Assainir la situation financière du régime agricole
Réaction du directeur général de la MSA
Le directeur général de la Caisse centrale de mutualité sociale agricole (CCMSA), François-Emmanuel Blanc, assure quant à lui que la MSA n’est « pas du tout en déclin structurel », en ce qu’elle contribue « au projet stratégique agricole français » en « prenant soin » de ceux dont dépend « l’autosuffisance alimentaire du pays ».
S'agissant des coûts de gestion, il concède cependant des « progrès à faire », tout en jugeant nécessaire de préserver les services de proximité : « aménager, faire des efforts, optimiser bien sûr, mais maintenir la présence territoriale, c’est fondamental pour la MSA », a-t-il indiqué à l’AFP.