Santé : quand les plus modestes paient le prix fort

PUBLIÉ LE :
Santé : quand les plus modestes paient le prix fort

En moyenne, les ménages français consacrent 15 % de leurs revenus à la santé, selon une étude de la DREES publiée en août 2025. Mais derrière cette moyenne se cachent de fortes inégalités : pour certains, notamment les retraités aisés, le poids de la santé reste relativement contenu. Pour d’autres, en particulier des actifs modestes ou des ménages mal couverts par une complémentaire santé, la facture peut vite atteindre des sommets inquiétants.

Un effort très inégal selon les profils

En 2019, les 10 % de ménages pour lesquels la santé pèse le plus dans les finances supportaient un « taux d’effort » de 23 %, soit près d’un quart de leur revenu absorbé par la santé. Pour 1 % des foyers, ce taux grimpait même à 34 %. Ces situations extrêmes concernent majoritairement des ménages modestes, parfois confrontés à des affections de longue durée (ALD), et souvent mal protégés faute de complémentaire santé solide.

Les actifs en emploi se retrouvent particulièrement touchés : ils représentent les trois quarts des foyers aux taux d’effort élevés. En cause : des prélèvements obligatoires (cotisations maladie, CSG, taxes) plus lourds que pour les retraités. Ainsi, les actifs en emploi très aisés consacrent 18 % de leur revenu à la santé, contre 11 % pour un ménage retraité du même niveau de vie.

Chez les ménages très modestes, l’écart est moins marqué : 15 % pour les actifs contre 14 % pour les retraités. Mais dans tous les cas, la santé pèse davantage sur les revenus les plus faibles.

Les retraités aisés, grands gagnants du système ?

Notre système d’assurance santé est censé être basé sur l’équité. Chacun doit contribuer, en fonction de ses ressources, au financement de cette protection. « De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ». Pourtant, l’étude de la DREES montre que les règles ne produisent pas les mêmes effets selon l’âge et le statut.

Le financement de l’assurance maladie obligatoire est progressif pour les actifs : plus les revenus sont élevés, plus la contribution est importante. Mais pour les retraités, c’est l’inverse : le système devient régressif, car les restes à charge et les primes de complémentaire pèsent proportionnellement plus lourd pour les retraités modestes que pour les aisés. Résultat : les retraités fortunés consacrent une part plus faible de leur revenu à la santé que les retraités modestes.

Le piège du non-recours à la complémentaire santé solidaire

L’étude met aussi en lumière un problème récurrent : le non-recours aux dispositifs d’aide. En 2019, avant la généralisation de la Complémentaire santé solidaire (C2S), 12 % des personnes parmi les plus modestes n’avaient pas de complémentaire santé. Or, parmi les 1 % de ménages subissant les taux d’effort les plus extrêmes, beaucoup étaient éligibles à la CMU-C ou à la C2S… mais n’en bénéficiaient pas. Méconnaissance des dispositifs, démarches jugées trop complexes, ou revenus légèrement supérieurs aux seuils sont autant de facteurs pouvant expliquer cette situation.

Des dépenses qui interrogent en période de rigueur

Ces données, antérieures à la réforme du « 100 % santé » (déployée entre 2019 et 2021), éclairent sur un enjeu brûlant : la soutenabilité de la dépense de santé pour les plus vulnérables. Dans un contexte où l’État appelle les Français à consentir de nouveaux efforts budgétaires – hausse des franchises médicales, réforme du remboursement des ALD, etc. –, l’étude souligne le paradoxe d’un système qui demande proportionnellement plus à ceux qui ont le moins.

Pour les ménages du « top 1 % » des taux d’effort, la santé représente non seulement une charge financière colossale, mais aussi un risque de renoncement aux soins. En effet, près de la moitié des restes à charge concerne des soins dentaires ou des prothèses, souvent coûteux et mal remboursés.

Une équité à repenser ?

Le Code de la Sécurité sociale rappelle que la protection contre la maladie doit être assurée à chacun « en fonction de ses moyens ». Or, l’étude de la DREES révèle que cet idéal est loin d’être pleinement atteint. Les actifs modestes et certains retraités fragiles se retrouvent parmi les plus exposés, tandis que les retraités aisés profitent d’un système moins contraignant.

Dans un contexte où la solidarité nationale est invoquée pour justifier de nouvelles restrictions budgétaires, ces chiffres posent une question centrale : qui paie vraiment le prix de la santé en France ?

Cet article issu de Previssima.fr est soumis au droit d'auteur, protégé par un logiciel anti-plagiat. Toute reproduction, rediffusion ou commercialisation totale ou partielle du contenu, sans l’autorisation expresse de la société Previssima, est interdite. Les informations diffusées sur Previssima.fr (hors forum) sont toutes vérifiées par un service juridique spécialisé. Toutefois, Previssima ne peut garantir l'exactitude ou la pertinence de ces données. L'utilisation des informations et contenus disponibles sur l'ensemble du site ne peuvent en aucun cas engager la responsabilité de Previssima.