Santé mentale des femmes au fil des âges : ce que révèle le nouveau baromètre gouvernemental

À l’occasion de la Journée internationale d’action pour la santé des femmes le 28 mai 2025, un baromètre publié par le ministère du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles dresse un panorama de la santé mentale des femmes en France.
Santé mentale : les facteurs sociologiques qui expliquent les écarts de genre
Selon les données du baromètre, près de la moitié des femmes interrogées (44 %) déclarent avoir déjà souffert d’un trouble psychique au cours de leur vie, contre 36 % des hommes. 21% des répondants estiment d’ailleurs que les troubles psychiques touchent davantage les femmes que les hommes. Plusieurs facteurs influenceraient cet écart, parmi lesquels :
- La charge mentale liée aux responsabilités domestiques et familiales ;
- Les inégalités sociales et économiques, qui peuvent limiter l’accès à l’information, aux soins, et renforcer l’isolement ;
- Les traumatismes liés aux violences sexistes et sexuelles (37 % des femmes en France déclarent avoir vécu au moins une situation de non-consentement, 1 femme sur 4 déclare avoir subi des violences psychologiques exercées par son partenaire, et 1 sur 6 des violences physiques) ;
- Le manque d’accompagnement médical et social durant les bouleversements physiques et hormonaux à différents stades de la vie : puberté, grossesse, fausse couche, post-partum, endométriose, ménopause… autant de situations qui conduisent à des fluctuations de l’humeur et de l’anxiété, souvent négligées par l’entourage et dans le parcours de soin ;
- La sous-déclaration des troubles mentaux chez les hommes, du fait d’une socialisation genrée, qui a pour conséquence une moindre propension à reconnaître la détresse psychique, consulter un professionnel ou solliciter de l’aide.
Le baromètre met également en évidence une demande importante d’information, notamment chez les femmes de moins de 35 ans, dont 82 % souhaitent en savoir davantage sur la santé mentale féminine.
Maternité, endométriose, ménopause… Des étapes clés de la vie des femmes souvent négligées
La maternité, la ménopause et l’endométriose font partie de ces moments charnières où les femmes peuvent être exposées à une charge mentale exacerbée, à des douleurs invisibles, ou encore à une solitude émotionnelle face à un manque de reconnaissance ou de soutien.
La dépression post-partum touche une mère sur cinq en France
Dans les quatre semaines suivant la naissance, au moins 1 mère sur 5 est concernée par la dépression post-partum, trouble psychique qui peut se traduire par une grande fatigue, un sentiment d’impuissance ou de culpabilité, une tristesse persistante, ou encore des difficultés à créer un lien avec le bébé.
Pourtant, 85 % des femmes touchées ne bénéficient d’aucune prise en charge. Des dispositifs ont récemment été mis en place pour mieux accompagner les jeunes parents, comme l’application mobile « 1000 premiers jours, ou la création de consultations spécifiques en pédopsychiatrie périnatale. Mais le poids des normes sociales, en particulier l’injonction à être heureuse d’une naissance et à aimer son bébé, ainsi que le manque de relais dans le couple et l'entourage, continuent de faire peser une forte charge mentale sur les mères, en particulier les plus isolées.
L’endométriose, une pathologie chronique qui touche entre 1,5 et 2,5 millions de femmes menstruées
L’endométriose est une maladie inflammatoire chronique qui touche près d’une femme sur dix en France. Elle provoque une variété de symptômes allant des douleurs pelviennes aiguës à la fatigue chronique, en passant par des troubles digestifs ou urinaires, et peut entraîner des répercussions sur la fertilité. Le délai moyen de diagnostic est encore de 7 ans, et la gestion quotidienne de la douleur, les parcours médicaux lourds ou encore l’angoisse liée à l’injonction à la maternité font de l’endométriose une pathologie aux conséquences particulièrement importantes sur la santé mentale.
Le Gouvernement a mis en place une stratégie nationale autour de la recherche, de l’amélioration de l’offre de soins et de la formation des professionnels sur l’endométriose : développement du test salivaire Endotest®, intensification des filières de soins régionales, sensibilisation dès le milieu scolaire… Autant de premiers pas dont l’objectif est de réduire les retards de diagnostic et d’améliorer la qualité de vie des femmes concernées.
La ménopause, qui touche 500 000 femmes chaque année en France, est toujours aussi tabou
Enfin, la ménopause, étape naturelle marquant la fin de la période reproductive, reste largement invisibilisée, tant dans l’espace public qu’en milieu professionnel. Pourtant, elle concerne plus de 14 millions de femmes en France, dont près d’un quart souffrent de troubles sévères affectant leur quotidien. Bouffées de chaleur, troubles du sommeil, anxiété, douleurs, sentiment de perte ou de déclassement social : les répercussions sont nombreuses (en particulier chez les femmes ayant des antécédents dépressifs) et souvent méconnues.
Malgré cela, il existe encore de nombreux freins à la parole, notamment en raison du tabou lié à la ménopause et du manque d’informations disponibles. Pour y remédier, des premières actions ont été initiées : création d’une consultation dédiée à la ménopause, soutien à la recherche, sensibilisation dans le monde du travail, et lancement du dispositif « Mon bilan prévention » pour les femmes de 45 à 50 ans, qui permet un accompagnement précoce dès l’apparition des premiers symptômes.
Une santé mentale encore trop tributaire des inégalités systémiques
Ces trois exemples illustrent combien la santé mentale des femmes est encore liée à leur santé reproductive, souvent prise en étau entre injonctions sociales, défaillances de l’accompagnement médical, et invisibilisation des douleurs. Mais au-delà de ces moments charnières, d’autres réalités invisibilisées continuent de peser lourd : précarité menstruelle, violences gynécologiques et obstétricales, tabous autour de la puberté ou des parcours de transition hormonale... Ces enjeux, souvent marginalisés dans les politiques de santé publique, affectent directement le bien-être et la dignité des femmes tout au long de leur vie. La construction d’une approche véritablement croisée – médicale, sociale et psychologique – semble essentielle pour faire de la santé mentale des femmes une priorité à part entière, au-delà des seuls enjeux reproductifs.