Report des congés payés en cas de maladie : la France rappelée à l’ordre par la Commission européenne

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Report des congés payés en cas de maladie : la France rappelée à l’ordre par la Commission européenne

Le 18 juin 2025, la Commission européenne a ouvert une procédure d’infraction contre la France au titre de la directive 2003/88/CE sur le temps de travail.

En cause, l’absence de mécanisme permettant aux salariés français de reporter leurs jours de congés annuels lorsqu’ils tombent malades pendant cette période.

Le droit européen en la matière

L’article 7 de la directive 2003/88/CE impose à tous les États membres de garantir un minimum de quatre semaines de congés payés par an, sans substitution possible par une indemnité (sauf en cas de rupture du contrat) :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d'un congé annuel payé d'au moins quatre semaines, conformément aux conditions d'obtention et d'octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales. La période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité financière, sauf en cas de fin de relation de travail  » .

En complément de l’article 7, qui assure une protection au repos effectif des travailleurs, l’article 16 de la directive prévoit que :

« Les périodes de congé payé annuel (…) et les périodes de congé de maladie ne doivent pas être incluses, ou doivent être neutralisées dans le calcul des moyennes. »

Autrement dit, ces deux types de périodes doivent être traitées de façon distincte, car elles répondent à des objectifs différents : l’une relève du repos, l’autre de la santé. Cette disposition a été consolidée par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), notamment dans les arrêts Schultz-Hoff et Heimann, qui établissent qu’un salarié tombant malade pendant son congé annuel doit pouvoir bénéficier ultérieurement des jours de congé qui ont coïncidé avec la maladie.

Or, selon la Commission européenne, le droit français ne respecte pas cette exigence : la procédure d’infraction (INFR(2025)4012) du 18 juin 2025 est la première étape d’une procédure pouvant aboutir à une condamnation devant la CJUE.

France : une législation qui « ne garantit pas la santé et la sécurité des travailleurs »

À ce jour, le Code du travail français ne prévoit en effet pas explicitement le droit au report des congés payés en cas de maladie survenant pendant les congés. Si la jurisprudence de la Cour de cassation a évolué ces dernières années - notamment avec l’arrêt du 13 septembre 2023 qui reconnaît l’acquisition de congés payés pendant un arrêt maladie non professionnel - elle n’a pas encore consacré le principe de report en cas de maladie intercurrente.

▶ Un salarié qui tombe malade alors qu’il est déjà en congé payé ne peut, en l’état actuel du droit, en exiger le report, sauf dispositions conventionnelles plus favorables.

Dans sa procédure d’infraction, la Commission européenne considère donc que :

« La législation française ne garantit pas que les travailleurs qui tombent malades pendant leur congé annuel puissent récupérer ultérieurement les jours de congé annuel qui ont coïncidé avec leur maladie. (…) La législation française n’est donc pas conforme à la directive sur le temps de travail et ne garantit pas la santé et la sécurité des travailleurs. »

Et maintenant ?

La France dispose désormais d’un délai de deux mois pour répondre à la lettre de mise en demeure de la Commission européenne. Si elle ne propose pas de mesure corrective satisfaisante, la Commission pourrait émettre un avis motivé, étape préalable à une possible saisine de la Cour de justice de l’Union européenne.

Ce nouveau signal d’alarme intervient moins de deux ans après les arrêts de la Cour de cassation ayant reconnu l’acquisition de congés payés pendant l’arrêt maladie, alignant partiellement le droit français sur le droit de l’Union.

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