Réforme des allègements des cotisations patronales : que prévoit le PLFSS pour 2025 ?

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 prévoit la révision des allègements de cotisations patronales. Il ne s’agit pas vraiment d’une surprise, Michel Barnier ayant fait part de sa volonté de réformer ces dispositifs dans son discours de politique générale du 2 octobre.
L’objectif serait double : diminuer le coût des allègements généraux, qui a bondi ces dernières années du fait des revalorisations successives du SMIC, et inciter à la revalorisation des salaires.
Décryptage.
Les failles des mécanismes d’allègements de cotisations existants
Les dispositifs d’allègements des prélèvements sociaux patronaux, nés dans les années 1990 et réformés successivement depuis, sont actuellement au nombre de trois :
- La réduction générale des cotisations patronales, qui s’applique sur les salaires n’excédant pas 1,6 SMIC, soit 2 827 € brut ;
- Le taux réduit de cotisation patronale d’allocations familiales pour les salariés dont la rémunération n’excède pas 3,5 SMIC (en valeur au 31 décembre 2023) ;
- Le taux réduit de cotisation patronale d’assurance maladie pour les salariés dont la rémunération n’excède pas 2,5 SMIC (en valeur au 31 décembre 2023).
Aujourd’hui, les allègements de cotisations patronales sont ainsi très importants au niveau du SMIC (où quasiment aucun prélèvement patronal n’est dû), puis se réduisent rapidement jusqu’à 1,6 SMIC, avant de se transformer en allègement partiel et proportionnel aux salaires jusqu’à 3,5 SMIC.
Ces dispositifs posent plusieurs problèmes :
- Ils créent un phénomène de trappes à bas salaires : la hausse des salaires au-dessus du SMIC est extrêmement coûteuse pour les employeurs, ce qui n’incite pas à leur revalorisation et entraîne une concentration des salaires à ce niveau ;
- Ils sont très coûteux pour l’État : les revalorisations du SMIC entraînées par l’inflation galopante de ces dernières années ont augmenté l’enveloppe globale des allègements. Ils ont atteint 80 Md€ en 2023, soit 20 Mds€ de plus qu’en 2021 ;
- Ils atteignent désormais une part des revenus où ils sont moins pertinents : du fait de l’augmentation du SMIC, les réductions proportionnelles de cotisations sociales s’appliquent maintenant à des niveaux de revenus où elles sont moins justifiées ;
- Ils ne facilitent pas l’appropriation et la bonne application des règles : la sédimentation de ces trois dispositifs aux profils, règles et périmètres d’application distincts complique leur compréhension et leur mise en œuvre.
La solution, concevoir un dispositif unifié
Afin d’éradiquer ces problèmes, le PLFSS 2025 révise les allègements de cotisations patronales. Il est prévu de fusionner les dispositifs, et de lisser la baisse des exonérations de manière à ce que le coût d’une augmentation de salaire net du salarié soit atténué pour l’employeur :
- Les exonérations patronales baisseront légèrement au niveau du SMIC, de l’ordre de 2 points en 2025, et de 2 points supplémentaires en 2026, jusqu’à 1,3 SMIC ;
- Elles seront ensuite renforcées entre 1,3 et 1,8 SMIC ;
- Puis baisseront progressivement au-delà, pour s’éteindre à 3 SMIC.
Pour rappel, cette réforme intervient dans le sillage du rapport remis à Michel Barnier le 3 octobre dernier, rédigé sous la houlette des économistes Antoine Bozio et Étienne Wasmer et intitulé « Les politiques d’exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire ».
Le scénario central imaginé par les deux économistes, non repris dans le PLFSS, consistait à réduire les exonérations de cotisations de 4,05 points au niveau du SMIC, et d’abaisser fortement la pente des allègements pour un point de sortie autour de 2,5 SMIC.
Une réforme en deux étapes
La réforme devrait se faire en deux étapes, en 2025 et 2026.
Dès l’année prochaine, les paramètres du régime actuel des exonérations se recentreraient sur les bas salaires via la réduction des allègements sur les cotisations d’assurance maladie et d’allocations familiales, respectivement pour les salaires supérieurs à 2,2 SMIC et 3,2 SMIC (contre 2,5 et 3,5 SMIC actuellement). Cette mesure, qui engendrera une économie de 4 Mds€ se fera au profit des branches maladie et vieillesse.
Cette première étape diminuera et lissera les taux marginaux d’imposition au niveau du SMIC, dont les niveaux élevés aujourd’hui sont l’une des causes de la concentration des salaires au niveau du SMIC.
Par ailleurs, l’ensemble des primes de partage de la valeur (PPV) versées à compter du 10 octobre 2024 devraient être prises en compte dans l’assiette qui permet de calculer le volume d’allègements. Elles faisaient jusqu’ici l’objet d’une exclusion par tolérance doctrinale.
Attention, le PLFSS est actuellement au stade de projet. Les mesures mentionnées ne seront mises en œuvre que si le texte de loi est adopté sans modification.
Pour aller plus loin et comprendre le mécanisme de la réduction générale des cotisations patronales :