Pour la Cour des comptes, les conséquences de la crise sanitaire affecteront durablement les finances sociales

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Pour la Cour des comptes, les conséquences de la crise sanitaire affecteront durablement les finances sociales
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Dans son dernier rapport sur l’application des lois de financement de la Sécurité sociale, publié mardi 5 octobre 2021, la Cour des comptes a indiqué que la situation des finances publiques, et en particulier celle des finances sociales, porterait pendant encore un moment les stigmates de la crise sanitaire.

L’épidémie de covid 19 a provoqué en 2020 le déficit le plus élevé jamais enregistré par la sécurité sociale, représentant 1,7 point de PIB. Proches de l’équilibre en 2019 et après avoir subi en 2020 un déficit d’ampleur inédite (- 39,7 Md€), les régimes obligatoires de base de sécurité sociale et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) connaîtront encore en 2021 un fort déséquilibre financier (- 34,8 Md€ de déficit prévisionnel). Au-delà de 2021, les perspectives d’évolution annexées au PLFSS 2022 prévoient un déficit de la sécurité sociale dans son ensemble de l’ordre de 15 Md€ à l’horizon 2024.

La juridiction financière est chargée principalement de contrôler la régularité des comptes publics. Si ses rapports n’ont pas de caractère contraignant, elle indique toutefois qu’il est nécessaire, une fois la crise devant nous, « d’amorcer une trajectoire de retour à l’équilibre financier de notre système de Sécurité sociale, avec pour objectif de limiter l’accroissement de la dette sociale, puis d’engager sa réduction progressive ».

À cette fin, la Cour a formulé 44 recommandations, articulées au sein de trois grandes thématiques :

  • Contenir les dépenses et l’endettement de la Sécurité sociale
  • Sortir des modes de gestion de crise
  • Relancer et accélérer les chantiers de réforme et d’amélioration de la gestion

Contenir les dépenses et l’endettement de la Sécurité sociale

Pour mieux maitriser l’évolution des dépenses sociales, des améliorations de l’organisation et du périmètre des lois de financement de la Sécurité sociale pourraient être utiles d’après la Cour des comptes.

Ainsi, les sages de la rue Cambon recommandent notamment d’améliorer ces lois, en obligeant le Gouvernement à déposer, en cours d’exercice, un projet de loi rectificatif en cas de remise en cause substantielle des prévisions de résultats votés à l’automne précédent, comme c’est le cas pour le budget de l’État.

En outre, l’extension des prévisions à l’ensemble des dépenses de protection sociale, notamment celles d’assurance retraite complémentaire et d’assurance chômage, est préconisée, afin de faire coïncider le champ des LFSS avec celui des administrations de Sécurité sociale (ASSO) utilisé dans le cadre du pilotage global des finances publiques.

Enfin, en raison du poids pérenne des mesures décidées au titre du « Ségur de la santé », la Cour estime nécessaire d’utiliser tous les leviers d’action agissant sur la dépense de santé, en veillant à accroitre la pertinence et la qualité des soins et à lutter contre les inégalités de santé.

Sortir des modes de gestion de crise

À travers trois enquêtes, la Cour a dressé des premiers bilans de la gestion de la Sécurité sociale pendant la crise. Qu’il s’agisse du versement des prestations ou du recouvrement des prélèvements sociaux, du recours facilité aux outils de la télésanté ou de la suspension provisoire de la régulation des dépenses dans le champ de la biologie médicale, les dispositions mises en œuvre ont répondu à des situations d’urgence. Elles ne peuvent cependant perdurer en l’état :

  • Les organismes de sécurité sociale doivent revenir à des modes de gestion prenant suffisamment en compte les impératifs de recouvrement des prélèvements et de contrôle ;
  • L’usage de la télésanté doit être recentré pour faciliter l’accès aux soins et la coordination entre professionnels de santé. Il doit être sélectif, et non pas s’installer comme une modalité supplémentaire de réalisation des actes. La Cour préconise notamment de mettre fin à la prise en charge à 100 % des téléconsultations et d’élaborer un plan de contrôle a posteriori de la facturation de ces actes ;
  • Les dépenses de biologie médicale doivent être à nouveau régulées tout en assurant une meilleure prise en charge des actes innovants de biologie.

Relancer les chantiers de réforme et d’amélioration de la gestion

La relance de nombreux chantiers de réforme ou de modernisation de la gestion a été retardé par la crise sanitaire, et apparaît indispensable, aux yeux de la Cour des comptes, pour redresser la situation financière de la Sécurité sociale. Le rapport fait ressortir quatre grandes priorités :

  • Accélérer l’adaptation des modes de financement des établissements de santé et des établissements et services médico-sociaux ;
  • Faire aboutir la dématérialisation des prescriptions médicales, domaine où la France est très en retard par rapport au Royaume-Uni, à la Belgique, à l’Espagne ou à l’Italie ;
  • Moderniser le dispositif de reconnaissance et de réparation des accidents de travail et des maladies professionnelles : la branche AT-MP doit, notamment, réorienter ses priorités en faveur des actions favorisant la reprise du travail des salariés en arrêt, exposés aux risques de la désinsertion professionnelle ;
  • Améliorer l’efficience de deux allocations de solidarité : le minimum vieillesse ou ASPA, dont les règles d’attribution très complexes mériteraient d’être simplifiées, et l’allocation de rentrée scolaire, dont le bénéfice pourrait être recentré sur les familles aux revenus les plus bas, et le barème ajusté pour mieux couvrir la progressivité des dépenses liées à la scolarité en fonction de l’âge des enfants.

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