Pensions alimentaires : un changement fiscal d’ampleur à venir pour les parents qui la versent et la reçoivent

PUBLIÉ LE :
Pensions alimentaires : un changement fiscal d’ampleur à venir pour les parents qui la versent et la reçoivent

Annoncée dans le cadre du Budget 2026, la réforme de la fiscalité des pensions alimentaires entend simplifier un système jugé inéquitable et renforcer l’équité entre parents séparés. Si son intention est louable, son impact réel sur le pouvoir d’achat des familles reste à nuancer.

Un changement de logique fiscale profond

Aujourd’hui, le fonctionnement est bien connu : le parent débiteur, celui qui verse la pension, peut la déduire de son revenu imposable. À l’inverse, le parent bénéficiaire doit la déclarer comme un revenu, ce qui augmente son assiette fiscale. Ce mécanisme, pensé à l’origine pour équilibrer les efforts financiers entre les deux parties, fait depuis longtemps l’objet de critiques.

Un amendement adopté à l’Assemblée nationale dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026 vient bouleverser cette logique. Le texte prévoit que les pensions alimentaires versées ne seront plus déductibles, et que celles perçues ne seront plus imposables. Autrement dit, le transfert d’argent entre parents deviendrait neutre fiscalement.

Pour éviter tout effet d’aubaine, l’exonération serait toutefois plafonnée à 4 000 euros par enfant et par an, dans la limite de 12 000 euros. Au-delà, le montant excédentaire pourrait rester soumis à l’impôt, ce qui introduit une forme de progressivité dans le dispositif.

Une mesure pensée pour rétablir une forme d’équité entre les parents

Dans la majorité des cas, les pensions alimentaires sont versées par des hommes et perçues par des femmes. Pour les députés à l’origine de la réforme, soutenus par de nombreuses associations féministes, le système actuel est injuste : la pension ne devrait pas être considérée comme un revenu personnel, mais comme une somme destinée à couvrir les besoins de l’enfant - logement, alimentation, vêtements, scolarité, activités, etc.

La fiscalisation actuelle a donc pour effet de faire grimper artificiellement le revenu imposable des mères sans refléter une amélioration de leur situation réelle.

Les chiffres illustrent cette inégalité : selon l’Insee, le niveau de vie des femmes chute en moyenne de 19 % après un divorce, contre seulement 2,5 % pour les hommes. En supprimant l’imposition des pensions, le gouvernement espère atténuer cet écart durable entre les deux parents.

Des effets économiques probablement limités

Si la mesure est présentée comme une avancée en matière de justice fiscale, son impact réel pourrait rester modeste. En pratique, environ 80 % des foyers monoparentaux ne paient pas d’impôt sur le revenu. Pour ces familles, la défiscalisation de la pension n’aura donc aucune incidence directe sur leur pouvoir d’achat. Elle bénéficierait surtout aux 20 % de ménages les plus aisés, ceux dont les revenus sont suffisamment élevés pour être imposables.

S’ajoute un autre risque : la suppression de la déduction fiscale pour le parent qui verse la pension. Cette perte d’avantage pourrait conduire certains à réduire le montant versé, voire à suspendre les paiements dans les situations financières les plus tendues.

Une réforme censée rétablir une forme d’équité pourrait ainsi, paradoxalement, fragiliser le principe même de solidarité entre parents séparés. D’autant que le non-paiement des pensions alimentaires reste un problème récurrent : selon la Drees, un quart des parents séparés ne s’acquittent pas de leurs obligations, malgré les dispositifs de recouvrement existants.

Cet article issu de Previssima.fr est soumis au droit d'auteur, protégé par un logiciel anti-plagiat. Toute reproduction, rediffusion ou commercialisation totale ou partielle du contenu, sans l’autorisation expresse de la société Previssima, est interdite. Les informations diffusées sur Previssima.fr (hors forum) sont toutes vérifiées par un service juridique spécialisé. Toutefois, Previssima ne peut garantir l'exactitude ou la pertinence de ces données. L'utilisation des informations et contenus disponibles sur l'ensemble du site ne peuvent en aucun cas engager la responsabilité de Previssima.