Fitch dégrade la note de la France : faut-il craindre pour vos économies ?

La décision de l’agence de notation Fitch d’abaisser la note de la France, vendredi 12 septembre, a été justifiée par le fait que l’Hexagone est incapable d’adopter un budget et traverse une instabilité politique chronique.
Cette décision, sans provoquer de crise immédiate, laisse néanmoins planer un doute sur la sécurité des placements financiers des Français. Que faut-il attendre concrètement pour votre patrimoine ? Éléments de réponse.
Un signal plus qu’une rupture
C’est à 23h, vendredi dernier, que l’agence de notation Fitch s’est finalement résolue à dégrader la note de crédit accordée à la dette publique française, qui passe de « AA- » à un simple « A+ ». Il s’agit de la première des trois grandes agences à retirer son « double A » à l’Hexagone. Cette annonce ouvre d’ailleurs le bal des publications des agences de notation, selon un calendrier déjà fixé.
Agence |
Notation |
Perspective |
Dernière décision |
Date prévisionnelle de la prochaine décision |
DBRS |
AA (high) |
Négative |
21 mars 2025 |
19 septembre 2025 |
Fitch |
AA- |
Négative |
14 mars 2025 |
12 septembre 2025 |
Moody's |
Aa3 |
Stable |
11 avril 2025 |
24 octobre 2025 |
Standard & Poor's |
AA- |
Négative |
30 mai 2025 |
28 novembre 2025 |
Scope |
AA- |
Stable |
4 avril 2025 |
26 septembre 2025 |
KBRA |
AA |
Négative |
13 juin 2024 |
12 décembre 2025 |
Rappelons que la meilleure note possible est le triple A (AAA). Plus la note est élevée, plus le risque est faible. Un A+ correspond à une note « assez bonne », comparable à un 16 sur 20. Cette décision marque toutefois un recul symbolique : le pays conserve une signature jugée solide, mais se retrouve désormais perçu comme un emprunteur un peu plus risqué.
Un impact sur les taux d’intérêt
La conséquence la plus directe concerne le coût de financement de l’État. Une note plus faible signifie que les investisseurs exigent une prime de risque plus importante, donc des taux plus élevés sur les nouvelles émissions de dette.
La France pourrait ainsi voir ses marges budgétaires se réduire, compliquant le financement de politiques publiques telles que la transition énergétique, l’éducation ou la santé.
…mais moins sur l’épargne et les crédits
Il faut néanmoins garder à l’esprit que la dégradation de la note française était déjà largement anticipée par les marchés, qui avaient conscience de la situation. De plus, les agences de notation interviennent généralement à posteriori afin de ne pas affoler les investisseurs.
Résultat : cette annonce n’a pas provoqué de choc immédiat. Le CAC 40, par exemple, a ouvert en hausse lundi matin (+1,30 % à 10h15), preuve que les opérateurs avaient déjà largement anticipé la décision de Fitch. Lorsqu’elle est anticipée, une mauvaise nouvelle paraît toujours moins brutale.
Concernant les crédits immobiliers, les banques avaient déjà commencé à relever légèrement leurs taux dès la fin octobre, après plusieurs mois de stagnation. En revanche, il est très peu probable que l’on observe une baisse à court terme. Le statu quo de la Banque centrale européenne sur ses taux directeurs, combiné à la décision de Fitch, rend plus plausible une hausse graduelle dans les prochains mois.
« Nous nous attendons à une légère augmentation des taux d’ici à la fin 2025, dans une fourchette de 3,25 % à 3,5 % pour des durées de crédit de 20 à 25 ans », soulignait récemment dans Capital Thomas Lefebvre, vice-président de SeLoger en charge des données.
S’agissant des taux réglementés comme le Livret A, le LDDS ou le LEP, l’impact devrait être pratiquement nul. Leur rémunération dépend avant tout de l’inflation et des décisions gouvernementales. Or, les prévisions de l’Insee confirment une inflation basse jusqu’à la fin de l’année, autour de 1,1 %. Sur la période juillet-décembre 2025, la moyenne atteindrait 1,03 %. Rappelons que ces cinq mois sont ceux pris en compte pour la révision du taux du Livret A au 1er février 2026.
Une nouvelle baisse des taux réglementés est donc envisageable l’an prochain, sauf intervention exceptionnelle de l’État ou de la Banque de France. Si cette baisse avait bien lieu, elle n’aurait cependant pas de lien direct avec la dégradation de la France.
La question fiscale en suspens
Enfin, si le service de la dette devient plus coûteux et que les déficits se creusent, l’État serait tenté d’augmenter certaines recettes. Cela pourrait passer par une hausse d’impôts, de nouvelles contributions ou un ajustement des niches fiscales. Rien n’est encore annoncé par le nouveau gouvernement de Sébastien Lecornu, mais c’est un scénario que les épargnants doivent garder en tête.
Au final : une alerte qui réduit les marges de manœuvre
En résumé, la dégradation de la note française n’annonce pas un choc immédiat pour les ménages. Elle souligne surtout l’instabilité politique et budgétaire actuelle, dans un contexte où les marchés ont horreur de l’incertitude. C’est ce climat d’incertitude, plus encore que la note elle-même, qui constitue le véritable risque.
Pour les épargnants, la meilleure stratégie reste donc la diversification : ne pas concentrer son patrimoine uniquement sur les obligations françaises, mais équilibrer entre actions, immobilier, liquidités et placements divers : livrets réglementés, PEA, assurance vie, etc.