Épargne des enfants : une injustice qui commence dès le berceau ?

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Épargne des enfants : une injustice qui commence dès le berceau ?

En France, épargner pour un enfant - ouvrir un livret ou un produit d’épargne à son nom - est une pratique assez répandue. Mais cette « précaution pour l’avenir » n’est pas neutre : derrière, se jouent des inégalités profondes selon l’origine sociale, le patrimoine des parents ou la structure familiale. Une récente étude vient confirmer de grandes disparités liées essentiellement à la situation familiale et professionnelle des parents.

Épargne des enfants : une pratique courante mais inégalement répartie

Quelle est l’épargne des enfants ? À cette question, l’étude de l’Ined publiée cette semaine révèle une réalité très contrastée. Premier constat : si « dès la naissance, certains enfants disposent d’un livret ou d’un autre produit d’épargne ouvert à leur nom », d’autres « n’en ont pas à leur majorité ».

En s’appuyant sur les données de cinq enquêtes Insee menées entre 2003 et 2021, soit près de 29 000 enfants, l’étude montre que 55 % des 0-17 ans disposent d’au moins un produit d’épargne. Dans le détail, ils sont :

  • 35 % des 0-1 an à en posséder un,
  • 53 % des 10-11 ans,
  • 72 % des 16-17 ans.

Un peu plus d’un enfant sur deux, donc. Verre à moitié plein ou à moitié vide ? Dans un contexte où l’éducation financière devient capitale pour espérer atteindre un jour l’indépendance financière, on serait tentés d’opter pour la seconde hypothèse. D’autant que derrière ces pourcentages, la réalité est bien plus contrastée.

De grandes disparités selon le niveau de patrimoine des parents

Le montant de l’épargne détenue par les enfants varie ainsi fortement selon le patrimoine familial. En moyenne, un enfant dispose de 1 300 €. Mais l’écart est colossal : 10 % des enfants de 16-17 ans dépassent les 6 000 €, tandis que 40 % des jeunes du même âge n’ont aucun produit d’épargne à leur nom.

Cette fracture est, « sans surprise », liée au niveau de patrimoine et de revenus des parents. Parmi les chiffres marquants :

  • Les 0-1 an ont une épargne moyenne de 350 € (les 10 % les mieux dotés dépassent 850 €).
  • Les 10-11 ans disposent en moyenne de 1 470 € (10 % au-delà de 4 000 €).

Enfin, si la proportion d’enfants épargnants reste stable depuis 20 ans, le montant moyen a augmenté en euros constants, passant de 920 € en 2004 à 1 680 € en 2021.

L’impact des dynamiques familiales

Si le patrimoine des parents reste le facteur principal, l’étude de l’INED montre que d’autres déterminants - taille de la fratrie, structure du ménage (parents seuls, recomposés…), niveau d’éducation des parents - influencent l’épargne constituée pour les enfants. Les grands-parents interviennent aussi comme un levier clé.

Ainsi, à 16-17 ans, « un enfant vivant avec ses deux parents et dont les quatre grands-parents sont en vie détient une épargne de 3 300 €, alors qu’un enfant qui n’a plus aucun ou un seul grand-parent en vie dispose d’une épargne de 1 900 € », illustre l’étude, rappelant ainsi l’importante du « soutien intergénérationnel ».

Donations précoces ou héritages anticipés boostent ces comptes, favorisant ainsi les lignées déjà privilégiées. Géographiquement, les ruraux épargnent plus (14 % de leurs revenus) que les urbains (8 %), le signe à la fois de coûts de vie moindres mais aussi de traditions familiales solides.

Vers une égalité des chances ?

« Les inégalités en matière d’épargne individuelle apparaissent donc dès l’enfance et se creusent à l’adolescence. Lorsqu’ils atteignent la majorité, beaucoup d’enfants n’ont rien ou presque, tandis qu’une minorité dispose déjà de montants d’épargne substantiels, parfois comparables à ceux de ménages adultes modestes », souligne l’étude.

Dès lors, est-il possible - sinon de les effacer - au moins d’éviter que l’avenir financier d’un enfant dépende uniquement du milieu dans lequel il grandit ? Pour offrir de meilleures perspectives aux plus jeunes, certaines pratiques peuvent (et devraient) être mises en place très tôt : l’ouverture d’un livret d’épargne réglementé comme le Livret A, la souscription d’une assurance-vie à leur nom, ou encore la mise en place de virements réguliers, même de petits montants, afin de constituer progressivement un premier capital.

Car l’épargne précoce, même modeste, demeure un levier puissant. Elle permet, une fois arrivés à l’adolescence ou à l’entrée dans la vie adulte, d’aborder plus sereinement des dépenses importantes - études, permis, premier logement - et de prendre en main son avenir financier avec davantage d’autonomie.

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