« Derrière le transfert des cotisations AGIRC-ARRCO à l’URSSAF, se cache une réforme des retraites qui ne dit pas son nom » (Bruno Retailleau, sénateur LR de Vendée)

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« Derrière le transfert des cotisations AGIRC-ARRCO à l’URSSAF, se cache une réforme des retraites qui ne dit pas son nom » (Bruno Retailleau, sénateur LR de Vendée)

Alors le Gouvernement semble avoir acté le transfert du recouvrement des cotisations AGIRC-ARRCO à l’URSSAF à compter du 1er janvier 2023, les voix contestataires s’élèvent de toutes parts, jusque dans les rangs de la majorité présidentielle. Selon les frondeurs, la mise en œuvre d’une telle réforme dans les mois qui viennent exposerait à un risque de catastrophe industrielle de type RSI.

Certains politiques semblent partager cette inquiétude, puisque qu’une demi-douzaine d’amendements au PLFSS 2023 demandant la suppression pure et simple de la réforme, ont été adoptés ce lundi 10 octobre.

Alors que le Président de la République, Emmanuel Macron, recourt souvent la concertation s’agissant de grandes réformes, il semble vouloir passer en force sur le transfert du recouvrement des cotisations AGIRC-ARRCO. Un pied de nez au paritarisme, ce qui constitue une erreur historique selon Bruno Retailleau, sénateur LR de Vendée et chef de file des Républicains au Sénat. Entretien.

Previssima - Le Président de la République déclare vouloir privilégier la concertation pour faire avancer notre pays, notamment au travers du Conseil National de la Refondation. Que pensez-vous de la décision de passer en force sur le recouvrement des cotisations de retraite complémentaire Agirc-Arrco alors que l'ensemble des partenaires sociaux y sont opposés ?

Bruno Retailleau - Pour Emmanuel Macron, la concertation n’est qu’un outil de communication. Les partenaires sociaux ne sont pas dupes et plusieurs d’entre eux ont d’ailleurs décidé de déserter le grand raout que constitue le Conseil National de la Refondation.

Et pour cause, l’objectif du Président de la République n’est pas tant d’écouter que de conforter des décisions déjà prises. Le passage en force sur le transfert du recouvrement des cotisations AGIRC-ARRCO aux URSSAF est la parfaite illustration d’un pouvoir vertical.

L’ensemble des partenaires sociaux en charge de la gestion de l’AGIRC-ARRCO viennent de demander a minima, un report de la mise en œuvre de cette réforme, en vain. Alors que la gestion partenariale de cette caisse de retraite mérite d’être saluée, le Gouvernement préfère poursuivre son chemin solitaire. C’est une erreur historique, le paritarisme fait partie de l’ADN français.

Selon vous, faut-il reporter cette mesure ou tout simplement la supprimer ?

L’AGIRC-ARRCO est bien gérée, sans doute trop bien aux yeux du Gouvernement. Derrière cette réforme présentée comme technique, se cache une réforme des retraites qui ne dit pas son nom.

Le recouvrement des cotisations de retraite complémentaire par l’URSSAF pourrait permettre à l’État impécunieux de capter les réserves du régime pour en financer d’autres.

En outre, avec un tel transfert, les risques de dégradations du service sont réels. En ajoutant un intermédiaire - l’URSSAF - les erreurs dans les droits à retraite des salariés vont se multiplier.

Dans une démocratie apaisée, comment devraient, selon vous, s'organiser les relations entre l'État et les partenaires sociaux ?

Le paritarisme est une modalité de gouvernance à la française de la protection sociale qu’il convient de sauver. On entend de-ci de-là des voix s’élever pour appeler à la fin du paritarisme ; abandonner ce système de gestion reviendrait à remettre en cause notre modèle social.

Dans un pays fracturé comme l’est la France aujourd’hui, céder aux sirènes du « tout État » est une grave erreur. Les partenaires sociaux ont raison de vouloir reconquérir des marges de manœuvre après avoir beaucoup perdu depuis qu’E. Macron est à la tête de l’État.

Le retour du paritarisme implique de revenir à un système assuranciel de la protection sociale, lequel a été détruit étage par étage pour y substituer un système fiscalisé. Son retour doit s’accompagner d’une règle d’or qui ne laisse pas de place aux déficits répétitifs.

La gestion de l’AGIRC-ARRCO montre que lorsque les partenaires sociaux ont la main, ils sont plus compétents que l’État. Par exemple, pour assurer l’équilibre financier du régime AGIRC-ARRCO, les partenaires sociaux ont décidé d’allonger la durée de travail ouvrant droit à une retraite à taux plein.

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