Congé de paternité : pourquoi 3 pères sur 10 n’exercent pas leur droit ?

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Congé de paternité : pourquoi 3 pères sur 10 n’exercent pas leur droit ?
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Dans une étude publiée récemment, le Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq) établit que, si la majorité des jeunes pères recourent au congé de paternité, environ 3 sur 10 n’exercent pas leur droit. Pour expliquer ce non-recours résiduel, le Céreq relève notamment deux raisons : la situation professionnelle et la rémunération.

À noter que l'étude est réalisée sur des jeunes devenus pères entre 2010 et 2017, alors que le congé de paternité se composait de 11 jours consécutifs, et que la réforme de juillet 2021 n’était pas encore intervenue.

Une situation d’emploi précaire limite le recours au congé

D’après l’étude, l’instabilité de l’emploi est un facteur central d’inégalités dans la prise du congé parental :

  • Lorsqu’ils sont en CDI au moment de la naissance, la très large majorité des pères (87 %) recourent au moins partiellement au congé de paternité ;
  • Les pères demandeurs d’emploi indemnisés sont seulement 24 % à utiliser tout ou partie des 11 jours, même si le congé leur permet de reporter d’autant la durée de leur droit au chômage ;
  • Un tiers des indépendants recourent au dispositif ;
  • Les pères en contrats courts et discontinus (CDD, intérimaires, vacataires, emplois aidés) sont 65 % à avoir exercé leur droit à congé.

Ce faible recours des demandeurs d’emploi indemnisés, des indépendants, et dans une moindre mesure, des pères en contrats courts, peut s’expliquer d’abord par la méconnaissance du droit. Au regard de leur statut, ces pères peuvent se croire inéligibles au dispositif, d’après l’étude. Par ailleurs, pour les pères au chômage, demander des congés au cours d’une période de non-emploi peut apparaître contradictoire.

Chez les intérimaires et les pères en CDD, le non-recours peut s’expliquer par un sentiment d’illégitimité ou par la difficulté d’anticiper les périodes d’emploi et de non-emploi.

Chez les indépendants, le montant des indemnités journalières, plus bas que le plafond des salariés du secteur privé, conduit à une perte financière pour les revenus mensuels nets supérieurs à environ 1 600 € entre 2010 et 2017, ce qui peut également décourager le recours au dispositif.

Enfin, l’appréhension de conséquences négatives sur la carrière pourrait également être derrière le plus faible recours (59 %) des pères qui travaillent depuis moins d’un an dans leur entreprise au moment de la naissance, bien que le droit au congé de paternité soit ouvert sans condition d’ancienneté. Ce recours est 3 fois plus faible chez les pères ayant moins d’un an d’ancienneté par rapport à ceux qui occupent leur poste depuis 2 ans ou plus.

Le recours est plus faible aux extrémités de la distribution des revenus

L’étude relève également que le recours au congé de paternité est plus faible aux deux extrémités de la distribution des revenus professionnels des pères. Ainsi :

  • Le recours est au plus bas chez les 20 % des pères les plus modestes (environ 67 %) ;
  • Il atteint un pic chez ceux dont le revenu est compris entre 2 500 € et 2899 € (environ 98 %) ;
  • Et il redescend chez les 10 % des pères les mieux rémunérés (73 %).

Le moindre recours dans le haut et le bas de la distribution des revenus s’explique par des logiques différentes :

  • Les pères en situation de précarité financière ne se trouvent pas dans une position favorable pour négocier le recours au congé auprès de leur employeur, ou pourraient davantage redouter l’impact du dispositif sur leur carrière professionnelle ;
  • Les pères les mieux rémunérés sont susceptibles de valoriser leur investissement dans leur emploi ou de ressentir une injonction à la disponibilité plus forte, par exemple s’ils exercent un poste de direction. Par ailleurs, le montant maximal des indemnités journalières (84,90 € en 2017) peut entraîner une perte de revenu chez les salariés du secteur privé aux salaires les plus élevés.

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