Complémentaire santé d’entreprise : un bilan 2016 en demi-teinte

Depuis le 1er janvier 2016, tous les employeurs du secteur privé ont l’obligation de souscrire et proposer à l’ensemble de leurs salariés, une complémentaire santé d’entreprise.
Ces contrats santé collectifs doivent être financés à minima à 50 % par l’entreprise et les garanties devront respecter un « panier de soins » minimum.
Un an après la mise en place de ces contrats, Jacques Nozach et Estelle Villermet, deux experts travaillant pour le cabinet conseil Actuaris, dressent un bilan plutôt mitigé.
Généralisation de la complémentaire santé : des résultats mitigés pour 2016
A l’origine, la généralisation à tous les salariés de la complémentaire santé d’entreprise devait permettre :
- Aux 400 000 à 600 000 salariés non couverts par une complémentaire santé
ET
- Aux 4,6 à 5,2 millions de salariés couverts par une complémentaire santé individuelle
de basculer dans les contrats de complémentaire santé d’entreprise obligatoires.
L’État tablait alors sur l’objectif suivant :
- Inverser le rapport 60 % individuel / 40 % collectif
- Permettre un meilleur accès aux soins, notamment en réduisant le coût de l’assurance
Actuellement, selon le niveau de cotisations, la part des contrats collectifs serait de 47 % (contre 53 % pour les contrat individuels).
Cependant, ce bilan pour 2016 ne prend en compte que les contrats de complémentaire santé d’entreprise souscrits au1er janvier de l’année. Or, au vu des nombreux textes de lois et décrets (ex : mise en place du « versement santé »), promulgués en toute fin d’année 2015, il est prévisible que l’ensemble des entreprises du secteur privé n’ont pu mettre en place un contrat collectif en date du 1er janvier 2016.
L’année 2017 permettra d’y voir plus clair
L’année 2017, devrait connaître une évolution plus marquée, notamment grâce à la disparition des facteurs conjecturels suivants :
- Les salariés qui n’avaient pu résilier leur contrat de complémentaire santé individuel dans les délais prévus et disposaient, de ce fait, d’une dispense d’affiliation au contrat collectif pourrons y adhérer pleinement en 2017
- Les accords de branche qui ont pris effet tout au long de l'année 2016 et qui renforcent l'obligation d'adhésion des salariés en rendant les décision unilatérale de l'employeur (DUE) juridiquement impossibles
Cependant, l’ampleur de cette évolution devrait être limitée par :
- Les dispenses d'affiliation au contrat collectif notamment pour les salariés précaires (CDD, temps partiel, etc.) au profit par exemple du « versement santé », pour les ayants droit des personnes déjà couvertes par un contrat d’entreprise, ou encore, pour les bénéficiaires de la CMU-C et de l'ACS
- Le nombre d'entreprises, en mettant en place des contrats collectifs par DUE (ce qui constitue un « changement substantiel » du contrat de travail), ont permis aux salariés de conserver leur contrat individuel ; l'adhésion à ces contrats n'est obligatoire que pour les salariés embauchés postérieurement ; ceux qui sont en place avant la décision peuvent la refuser
Le marché de la complémentaire santé : une faible évolution en 2016
Le marché de la complémentaire santé a faiblement évolué en 2016 : le chiffre d’affaires était de 34,858 milliards d’euros, soit une progression de +1,4 % par rapport à 2015 alors que l’évolution attendue était de l'ordre de 3 %.
Cette évolution morose du marché de la complémentaire santé s’explique par :
- La montée en puissance des contrats collectifs qui ont un niveau de cotisations moins élevé que les contrats santé individuels
- La mise en place des « contrats responsables » (plafonnement des dépassements des frais dentaires, d’optique, etc.) a probablement suscité une pause dans la progression des cotisations
- Une augmentation de la part de la consommation de biens et de soins médicaux (CBSM) prise en charge par les régimes de base (+1,1 % en 2016) à hauteur de 77 % Cela peut notamment s’expliquer par l’augmentation du nombre d’exonérations du ticket modérateur (patients en ALD, etc.)
- Une concurrence accrue entre les acteurs et certaines pratiques de sous-tarification ont sans doute pesé sur le volume des cotisations