Catherine Pays-Lenique (DG Epsens) : « L’épargne salariale est en forte progression et cela va encore s’accroître avec l’ANI sur le partage de la valeur »

La 7e édition de la Semaine de l’épargne salariale se tient du 27 au 31 mars 2023. C’est l’occasion de mettre en lumière les différents dispositifs existants mais également d’évoquer un marché en pleine expansion et une dynamique qui va continuer à s’accroître.
En effet, l’épargne salariale est amenée à se démocratiser et à être généralisée à l’ensemble des salariés, grâce à l’accord national interprofessionnel (ANI) sur le partage de la valeur signé par les partenaires sociaux le 10 février dernier.
Le point avec Catherine Pays-Lenique, directrice générale d’Epsens, acteur historique et majeur de l’épargne salariale et premier opérateur issu de l’économie sociale.
Previssima - Tout d’abord, comment se porte le marché de l’épargne salariale ?
Catherine Pays-Lenique – Le marché de l’épargne salariale est dynamique : on recensait 12 millions de porteurs au 31 décembre 2022, soit + 3 % en un an, pour un montant moyen de 13 500 € par salarié selon l’AFG. Au total, à cette date, le marché de l’épargne salariale représentait 162 milliards d’euros d’encours.
On constate une forte progression, qui nul doute va encore s’accroître avec l’accord national interprofessionnel (ANI) de partage de la valeur signé en février dernier.
On observe en outre que l’épargne salariale continue à bien se diffuser selon la dernière étude réalisée par les organisateurs de la Semaine de l’épargne salariale : toutes tailles d'entreprises confondues, 47 % des salariés disposent actuellement d’au moins un dispositif d’épargne salariale, c’est 4 points de plus en 3 ans. Sans surprise, c'est le plan d'épargne entreprise (PEE) qui reste le plus répandu (31 %), devant le PER collectif (25 %). En passant, il convient de constater la forte progression du PERECO au regard de son instauration récente par la loi PACTE.
Notons également le fort développement de l’épargne salariale au sein des entreprises de taille intermédiaire. Ainsi, sur les 3 dernières années, le taux de détention déclaré est passé de 50 % à 63 % chez les salariés des sociétés de 250 à 500 collaborateurs et de 40 % à 50 % chez les salariés des entreprises de 50 à 249 salariés.
L’épargne salariale demeure tout de même beaucoup moins développée au sein des TPE-PME, même si l’on note une certaine progression : dans les structures de 10 à 49 salariés, on est passé de 25 % à 31 % en 3 ans. Dans les entreprises de moins de 10 salariés, on est à un taux de détention de 15 %, ce qui reste faible.
Quelles sont les principales mesures de l’accord national interprofessionnel récemment signé visant à généraliser le partage de la valeur pour tous les salariés ?
L'ANI sur le partage de la valeur signé le 10 février dernier contient de nombreuses mesures notables, parmi lesquelles :
- à compter du 1er janvier 2025, les entreprises de moins de 50 salariés non couvertes, devront obligatoirement avoir au moins un dispositif de partage de la valeur (intéressement, participation, abondement, prime de partage de la valeur), dès lors que le bénéfice net fiscal représente au moins 1 % du chiffre d'affaires pendant 3 années consécutives ;
- les entreprises de plus de 50 salariés dégageant des résultats exceptionnels (cette notion n’est pas définie pour l’heure), devront verser aux employés un supplément de participation, d'intéressement ou un autre dispositif de partage de la valeur ;
- à partir de 2024, la prime de partage de la valeur sera intégrée à l'épargne salariale, soit dans un PEE, soit dans un PER, et bénéficiera à ce titre du régime fiscal et social favorable de l’intéressement ;
- une volonté de simplification du forfait social pour encourager la mise en place de dispositifs d’épargne salariale ;
- la création d’un dispositif plus simple que l'actionnariat salarié à travers l’instauration d’un plan de partage de la valorisation de l’entreprise. Il s’agirait de valoriser l'entreprise tous les 3 ans par accord collectif et de donner un montant de cette valorisation aux salariés ayant au moins un an d’ancienneté ;
- 3 nouveaux cas de déblocage anticipé d’un plan d’épargne salariale seraient inscrits dans la loi : les dépenses liées à la rénovation énergétique pour la résidence principale, l'achat d'un véhicule propre, les dépenses engagées en tant que proche aidant ;
- encourager les entreprises à intégrer des critères de responsabilité sociale et environnementale (RSE) dans les accords d'intéressement ;
- il sera obligatoire de référencer au moins 2 fonds qui intègrent des critères extra-financiers dans les fonds proposés aux salariés pour leur épargne salariale.
Quels sont les avantages liés à la mise en place d’un plan d’épargne salariale de type plan d’épargne entreprise ou PER collectif ?
Les avantages de l’instauration d’un PEE ou d’un PER Collectif sont principalement sociaux et fiscaux. Par exemple, s’agissant du PERECO, il peut vous permettre de déduire vos versements volontaires de l’impôt sur le revenu. Ils seront fiscalisés à la sortie mais avec un taux d’imposition probablement moins important, lié à la baisse de vos revenus à la retraite.
De fait, le PER Collectif constitue un moyen remarquable de préparer sa retraite, dans un contexte où le revenu de remplacement sera quand même beaucoup plus faible que le revenu d’activité perçu durant la vie active.
Il y a aussi le fait qu’aujourd'hui, quand vous recevez un candidat, si vous ne lui parlez que de salaire et que vous n'avez pas de dispositif d’épargne salariale à lui proposer, vous serez moins compétitif que les entreprises proposant ces mécanismes.
Plus globalement, l’épargne salariale bénéficie autant à l'entreprise qu’au salarié :
- pour l'entreprise, l’épargne salariale est un moyen de fidéliser ses salariés, tout en les mobilisant et les motivant car cela permet de les associer directement et financièrement aux résultats ;
- pour les salariés, cela leur permet d'augmenter leurs revenus et de se constituer une épargne disponible à moyen ou long terme ou qui leur permettra de compléter leurs revenus au moment de la retraite.
Parlez-nous de cette possibilité ouverte aux salariés de placer certains de leurs jours non travaillés sur leur PER collectif ?
En effet, une disposition très intéressante du PER collectif consiste à pouvoir épargner jusqu’à 10 jours de repos non pris en franchise fiscale et sociale, avec ou sans Compte Epargne Temps (CET).
Cela comprend les jours de RTT, de récupération, d’ancienneté, les droits en heures supplémentaires, les jours conventionnels. En l’absence de CET, vous pouvez épargner les jours de congés non pris au-delà du 24ème jour. En présence d’un CET, il s’agit des jours de congés payés qui excèdent 30 jours ouvrables.
Par exemple, un salarié qui met 10 jours par an pendant 5 ans sur son PER collectif va bénéficier de 50 jours de travail, de salaire non imposé, ce qui peut être très intéressant.
Concernant l’employeur, ce dispositif a l’avantage de limiter son passif social, qui peut être plus ou moins important en fonction du nombre de salariés.
Pouvez-vous nous dire quelques mots sur MoneyPitch, l’agrégateur de comptes lancé par Epsens ?
MoneyPitch est un agrégateur de comptes que nous avons lancé très récemment et qui vient compléter notre offre de services digitaux. Il permet aux salariés épargnants de toutes nos entreprises clientes d'avoir, via une interface unique, une vision à 360° de tous leurs comptes : épargne salariale, comptes courants, livrets d’épargne, assurance vie...
Cet outil offre la possibilité d’avoir un regard consolidé de son patrimoine et permet par exemple de choisir le compte sur lequel il peut être pertinent d’épargner.
À travers ce dispositif, nous souhaitons susciter l'intérêt de l'épargnant, lui donner un regard ludique et instructif sur l’épargne salariale.
Il faut savoir enfin que les données sont cryptées afin d’en sécuriser l’accès.
La Semaine de l’épargne salariale a débuté ce lundi 27 mars, quels sont les objectifs de ce rendez-vous annuel ?
Cette manifestation souhaite mettre en lumière les avantages des dispositifs d’épargne salariale qui attirent, fidélisent et engagent les salariés. L’objectif étant de démocratiser l’épargne salariale auprès des salariés et des entreprises.
Concernant cette 7e édition, elle est centrée sur l’ANI sur le partage de la valeur qui porte de nombreuses évolutions dans le champ de l’épargne salariale.
Il s’agit de sensibiliser les entreprises à l’intérêt de mettre en place des dispositifs de partage de la valeur avec leurs salariés. Mais aussi de rappeler aux salariés qu’ils peuvent profiter de leur épargne salariale pour se constituer une épargne de moyen et long terme pour réaliser leurs projets de vie. Parmi ces projets : la préparation de la retraite qu’il est fondamental d’anticiper.