« Aujourd’hui, seulement un quart des salariés aidants ont informé leur employeur de leur situation » (Virginie Magnant, directrice de la CNSA)

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« Aujourd’hui, seulement un quart des salariés aidants ont informé leur employeur de leur situation » (Virginie Magnant, directrice de la CNSA)

Alors que le vieillissement de la population française conduira, dans les années à venir, à une explosion du nombre de personnes âgées dépendantes, se pose la question du financement de la perte d’autonomie dans un contexte où la grande majorité de Français souhaitent vieillir à domicile.

Sur la question, une 5e branche de la Sécurité sociale dédiée à l’autonomie a été créée par la loi du 7 août 2020. Sa gestion a été confiée à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), un acteur contribuant aux politiques publiques en faveur des personnes âgées en perte d'autonomie, des personnes souffrant d’un handicap et de leurs proches aidants.

S’agissant des proches aidants, on en dénombre actuellement 8 à 11 millions en France. Ils sont la pierre angulaire de la prise en charge à domicile. Il est donc apparu nécessaire de les soutenir et de les accompagner à travers un droit au répit, des formations, des rencontres, un congé du proche aidant (indemnisé depuis octobre 2020 à travers le versement d’une allocation journalière du proche aidant), etc.

Le point sur les actions menées en faveur des proches aidants avec Virginie Magnant, directrice de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

Previssima - Quelles sont les actions de la CNSA en faveur des proches aidants ?

Virginie Magnant – La CNSA intervient dans le cadre de la stratégie nationale « Agir pour les aidants ». Nous pilotons un certain nombre des mesures de cette stratégie gouvernementale qui a été élaborée pour la période 2020/2022 et qui va se poursuivre à l’avenir. Dans le cadre de cette stratégie, la CNSA est responsable de plusieurs actions :

  • Financer le développement d’une offre d’accompagnement de répit pour les aidants, tels que les accueils de jour, les solutions d’hébergement temporaire et les plateformes de répit. Il s’agit de financer des actions collectives ou individuelles pour permettre aux aidants de se reconnaitre ou de se retrouver entre pairs, d’être formés ou de bénéficier de structures psychologiques ;
  • Dans les territoires, nous déléguons l’organisation de ces actions aux conseils départementaux, aux agences régionales de santé, aux caisses d’assurance maladie entre autres. Ces acteurs se retrouvent à l'échelle départementale dans des conférences de financeurs de la prévention de la perte d’autonomie. Ces rencontres sont l’occasion pour la caisse nationale d’inviter les acteurs à développer des actions de prévention de la perte d’autonomie, de soutien psychologique, de sensibilisation ou de formation pour les proches aidants.

Parmi les dispositifs mis en place à destination des proches aidants, l’Allocation journalière du proche aidant (AJPA). Deux ans après sa mise en œuvre, cette aide n’a pas rencontré le succès escompté. Pour quelle raison ?

La question de la reconnaissance des aidants et du soutien à leur apporter peut paraître comme nouvelle. En effet, avec la stratégie 2020/2022, c’est la première fois que le gouvernement décide de développer, au niveau national, un ensemble d’actions cohérent au profit des aidants.

La Direction de la Sécurité sociale (DSS) a estimé qu’au moment de la création de l’Allocation journalière du proche aidant (AJPA) en octobre 2020, presque 550 000 personnes y étaient éligibles. Néanmoins, les chiffres d’indemnisation demeurent actuellement très limités. Il y a probablement trois raisons pour expliquer cela :

  • La connaissance du dispositif : les structures mobilisées autour du dispositif (CNSA, CAF, MSA) ont informé les usagers sur sa mise en œuvre mais peut-être pas suffisamment, il faut donc poursuivre cette mobilisation. La CNSA prévoit d’ailleurs de mener, dans les mois à venir, une grande campagne d’information sur le sujet ;
  • Travailler sur le fait que les personnes se sentent autorisées à effectuer les démarches ; c’est vraiment un message qui doit être celui de la société entière et qui doit engager les aidants à se reconnaître et à s’autoriser à parler de leur situation à leur employeur, leur collègues… C’est un peu un travail culturel à mener ;
  • Le congé du proche aidant s’étend sur toute la carrière et les 66 jours d’indemnités peuvent être pris de manière très perlée. Donc, si vous n’avez besoin que d’une journée dans l’année, vous n’allez demander qu’une seule journée ; est-ce que les personnes vont faire la démarche pour l’indemnisation d’une ou des premières journées ? C’est une vraie question.

Pensez-vous que les récentes améliorations apportées par Gouvernement vont améliorer le recours à l’allocation ?

Avec le ministère des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées, nous suivons de près la manière dont le recours à l’allocation monte en charge afin de pouvoir adapter les choses au fur et à mesure. Le dispositif a déjà été amélioré par les dispositions de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2022 sur deux points : l’allégement des conditions de gravité de perte d’autonomie et un niveau d’indemnisation rehaussé pour être porté au niveau du SMIC.

Le congé du proche aidant est d’ailleurs simple à mobiliser : il se présente sous forme de capital jour. Chaque personne active, salariée ou indépendante, dispose d’un an de jours de congés sur toute sa carrière. Ceux-ci pouvant être pris de manière fractionnée ou non. L’aidant doit demander à son employeur à bénéficier de ce congé (ce dernier ne peut refuser), puis s’adresser à la CAF ou à la MSA (s’il relève du régime agricole) pour être indemnisé.

Aujourd’hui, seulement un quart des salariés aidants ont informé leur employeur de leur condition ; l’évocation de cette situation n’est pas rentrée dans les mœurs alors qu’elle est répandue et le sera encore plus à l’avenir avec le vieillissement de la population. Une situation d’aidant est naturelle, il faut que ça devienne normal de mobiliser ses droits.

En matière de grand âge, la CNSA pilote la 5e branche de la Sécurité sociale dédiée à l’autonomie. Quels en sont les grands défis ?

En tant que caisse nationale de Sécurité sociale, la CNSA a plusieurs défis :

  • Garantir sur l’ensemble du territoire la qualité et la visibilité des services publics de l’autonomie pour les personnes âgées et celles en situation de handicap ainsi que leurs proches. Nous travaillons notamment sur la simplification des démarches dans les MDPH et les maisons départementales de l’autonomie (MDA). Par exemple, à travers les droits à l’AAH et à la PCH ouverts à vie lorsque le handicap n’est pas susceptible d’évoluer favorablement ou encore, la possibilité de réaliser ses démarches en ligne depuis le portail cnsa.fr;
  • Permettre et garantir que partout en France, les personnes âgées qui le souhaitent puissent vieillir chez elles, dans des résidences autonomie, des habitats partagés ou encore des logements inclusifs ;
  • Mobiliser le plus efficacement possible tous nos moyens à destination des publics concernés. Sachant que nous disposons de ressources importantes, en effet le budget de la CNSA pour 2023 représente 35 milliards d’euros.

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