Assurance vie en unités de compte : l’ombre d’un doute sur l’attribution d’actions gratuites

Dans le cadre des contrats d’assurance-vie permettant des investissements sur des unités de compte, le Médiateur de l’assurance constate que la question des modalités de réinvestissement de leur rémunération est trop rarement explicitée dans les dispositions contractuelles. Or, il incombe à l’assureur, en sa qualité de rédacteur de la police, de rédiger un contrat clair et précis. En effet, les clauses contractuelles « s’interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur » précise le Code de la consommation.
En cas d’attribution d’actions gratuites, à qui reviennent les rompus ?
En 2012, un assuré a souscrit un contrat d’assurance sur la vie, investissant une partie de ses fonds sur un support en unité de compte, constitué d’actions d’une société cotée en bourse.
En 2017, cette société a procédé à une attribution d’actions gratuites dans le cadre d’une augmentation de capital, selon la parité suivante : la détention de 10 actions ouvrait droit à l’obtention d’une action nouvelle.
L’investissement de l’assuré sur l’unité de compte précitée avait permis l’acquisition de 29 actions de ladite société, ouvrant ainsi droit à l’attribution de deux actions gratuites nouvelles, soit l’équivalent de 20 actions détenues.
En matière de contrat d’assurance sur la vie, seule l’entreprise d’assurance est détentrice des titres sur lesquels l’investissement a été réalisé, le souscripteur ayant pour seul droit sa faculté de rachat.
Dans le cas soumis à la Médiation, si l’assureur avait procédé au réinvestissement des deux actions attribuées au titre de l’augmentation de capital, il restait néanmoins en suspens la question des « rompus », définis comme la part résiduelle d’actions détenues à la parité fixée, ne donnant donc pas droit à une action nouvelle.
La société émettrice avait précisé dans un document détaillant l’opération d’attribution d’actions gratuites, que les « rompus » feraient l’objet d’une indemnisation, par le versement d’une somme d’argent, équivalente à leur valeur.
L’assuré a sollicité le réinvestissement de cette somme, ce que l’assureur a refusé, estimant qu’aucune disposition contractuelle ne le justifiait. Les conditions générales du contrat prévoyaient simplement que les produits attachés à une unité de compte devaient être réinvestis sur cette dernière.
La décision du médiateur : les rompus doivent revenir à l’assuré
La somme d’argent attribuée par la société émettrice en contrepartie du « rompu » n’était versée qu’en raison de la détention d’actions par l’assureur ; cette détention résultant elle-même de l’investissement réalisé par l’assuré sur l’unité de compte concernée.
Cette somme s’analyse nécessairement en un « produit attaché à une unité de compte » au sens du contrat. En effet, et en l’absence de précision, l’expression « produit » ne peut être entendue – conformément aux dispositions de l’article L.211-1 du Code de la consommation – que dans son acception la plus large, favorable au consommateur. Il appartenait donc à l’assureur de réinvestir le rompu, sur la même unité de compte, conformément aux stipulations contractuelles.
Si l’assureur est effectivement titulaire des titres financiers et destinataire des dividendes ou revenus qui en sont issus, il ne l’est qu’en raison de l’investissement de l’assuré.
Aussi la logique économique commande-t-elle que l’assuré investisseur soit bénéficiaire de la rémunération résultant de cet investissement, quelle qu’en soit la forme, sauf clause contraire parfaitement explicite contenue dans la police.
Ainsi, en l’espèce, et en l’absence de toute précision, le Médiateur demande à l’assureur de réinvestir les sommes perçues au titre du rompu, en application des stipulations contractuelles relatives aux produits.
Ce qu'il faut retenir
Alerte assuré
Les assurés doivent être attentifs aux formes que peuvent prendre les rémunérations de leurs investissements, diverses selon les supports choisis, ainsi qu’aux modalités de leur réinvestissement.
Alerte assureur
Les assureurs doivent faire preuve de la plus grande précision au sein de la police quant à l’affectation de la rémunération découlant des investissements de l’assuré, étant rappelé que toute clause sujette à interprétation le sera dans un sens favorable au consommateur.
L’avis du Médiateur
En l’absence de dispositions contractuelles réglant expressément le sort de la rémunération de l’investissement de l’assuré, le Médiateur de l’Assurance se réfère à la logique économique du contrat afin de déterminer son affectation. Elle bénéficie au consommateur.
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