Arrêts maladie des seniors : le report de l’âge légal engendre un surcoût pour l’Assurance maladie

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Arrêts maladie des seniors : le report de l’âge légal engendre un surcoût pour l’Assurance maladie
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Le Centre d’études de l’emploi et du travail (CEET) s’interroge, dans une étude publiée le 14 février 2023, sur les effets du passage de l’âge légal de la retraite de 60 ans à 62 ans (réforme de 2010) sur les absences maladies. Si cette réforme a limité le déficit des caisses d’Assurance retraite, elle a en contrepartie engendré un surcoût pour l’Assurance maladie du fait de l’augmentation du nombre de jours d’arrêt de travail à indemniser. Le surcoût global d’absence maladie est ainsi estimé à 68 millions d’euros.

Le report de l’âge légal de départ en 2010 a entraîné une augmentation significative des arrêts maladie pour l’ensemble de la population, mais avec des effets différenciés selon le genre.

L’étude visait à démontrer que l’état de santé de certains individus peut être un frein à l’allongement de leur vie active. L’hypothèse de départ était la suivante : face à l’impossibilité de liquider leur retraite du fait du report de l’âge légal, « il ne leur reste que la possibilité de bénéficier de l’Assurance invalidité ou de l’Assurance maladie pour faire face à des problèmes de santé ou d’invalidité ».

Les faits semblent d’ailleurs aller dans ce sens. Un rapport de la Cour des comptes de 2019 « pointe en effet une croissance notable des dépenses pour le risque maladie, croissance dont il attribue une part non négligeable au vieillissement de la population des salariés » notamment à la suite de la réforme de 2010.

Pour valider cette hypothèse, les auteurs de l’étude se sont basés sur des données du panel Hygie 2005-2015. Elles résultent d’un appariement entre les données administratives de la CNAV et de la CNAM.

Constatations

Première constatation, cohérente avec l’hypothèse testée, « chez les femmes comme chez les hommes, les générations 1952-1954 sont caractérisées par des taux d’arrêts maladie à chaque âge après 60 ans (l’ancien âge d’ouverture des droits) supérieurs à ceux des générations non assujetties à la réforme ». Par exemple, la proportion des femmes ayant eu au moins un arrêt dans l’année à l’âge de 61 ans est de 7,7 % pour les salariées assujetties à la réforme, contre 4,36 % pour les générations non assujetties.

Deuxième constatation : les analyses économétriques confirment que la hausse de l’âge légal a entraîné une augmentation significative des arrêts maladie après 60 ans (+1,7 point). Le nombre annuel cumulé de jours d’arrêt augmenterait de 1,031 jours et le nombre annuel d’arrêt maladie de +0,021. Il ressort de cette analyse que « les femmes ont tendance à s’absenter plus souvent, mais moins longtemps ». Mais « l’effet mesuré étant global, la hausse de l’absence maladie peut résulter à la fois de la dégradation de l’état de santé lié à l’âge et de l’allongement de la vie active ».

Troisième constatation : la réforme entraîne une augmentation du recours aux arrêts maladie plus importante pour les individus en mauvaise santé. Sont considérés comme tels par les auteurs de l’étude les personnes ayant bénéficié d’au moins 60 jours consécutifs d’indemnisation d’arrêt maladie entre 40 et 55 ans. Or, « il s’avère que la réforme a eu un effet plus fort sur la probabilité d’arrêt sur les individus ayant connu des évènements de santé conduisant à des absences maladie de longue durée par le passé ». L’effet de la réforme sur le nombre de jours annuel en maladie est d’ailleurs plus important pour ces individus (+1,8 jour environ).

L’amélioration des conditions de travail des seniors, une nécessité

« Nos résultats suggèrent que les mesures de décalage de l’âge de départ à la retraite, similaires à celle de 2010, doivent être accompagnées de mesures permettant de tenir compte de l’hétérogénéité des situations parmi la population active ». Des mesures qui incluent tout particulièrement la possibilité laissées aux salariés fragilisés – tant par leur parcours professionnel que par leur état de santé – d’accéder plus tôt à la retraite.

Lors de la réforme de 2010, des possibilités de départ avant 62 ans étaient ouvertes (carrière longue, pénibilité…). Ces dispositifs semblent insuffisants « et doivent être renforcés en cas de nouveau décalage de l’âge de départ » alerte le CEET.

« Des mesures préventives devraient également être envisagées en accompagnement » : améliorer des conditions de travail afin de préserver la santé des salariés, réserver les postes les moins pénibles aux seniors, assouplir leur temps de travail, faciliter le départ progressif à la retraite, etc.

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