Arrêt maladie : que changerait pour vous l’augmentation du délai de carence envisagée par l’exécutif ?

Rebelote. Selon des informations dévoilées par la Tribune, le gouvernement envisagerait de nouveau d’augmenter le nombre de jours de carence des salariés en cas d’arrêt de travail.
On vous explique les pistes – très décriées - à l’étude.
Le délai de carence, c’est quoi ?
Le délai de carence correspond à la période entre le jour d’arrêt de travail et le jour à compter duquel vous pouvez commencer à percevoir des indemnités journalières de la part de la Sécurité sociale.
À l’heure actuelle, les indemnités journalières de la Sécu (IJSS) sont versées dès le 4ème jour d’arrêt de travail, c’est-à-dire au terme d’un délai de carence de 3 jours.
Les conventions collectives couvrant les salariés peuvent toutefois prévoir des dispositions plus favorables pour les salariés : de fait, pour une majorité d’entre eux (environ 2/3), le délai de carence de la Sécurité sociale est pris en charge par l’entreprise via l’intermédiaire d’un contrat de prévoyance.
Délai de carence : pistes envisagées par l’exécutif
En 2022, 8,8 millions d’arrêts maladie ont été décomptés, contre 6,4 millions il y a 10 ans. Cette augmentation préoccupe l’exécutif, qui s’inquiète depuis quelques mois pour le budget de la Sécurité sociale.
Pour le gouvernement, le coupable est tout trouvé : l’augmentation des arrêts de travail de « complaisance », qui auraient bondi ces dernières années. L’idée d’un durcissement des règles sur les jours de carence fait surface dès septembre 2023, avant d’être abandonnée à la suite de vives contestations.
D’après les informations recueillies par la Tribune, l’exécutif serait en train de remettre au goût du jour ce débat. Deux mesures seraient envisagées :
- L’augmentation du nombre de jours de carence pour le versement des indemnités journalières de la Sécurité sociale. Aujourd’hui fixé à 3 jours, le nombre de jours de carence pourrait atteindre 4, 5, 6, voire 7 jours ;
- La mise en place d’un jour de carence d’ordre public, que ni la Sécurité sociale, ni l’employeur (via les contrats de prévoyance) ne pourraient prendre en charge. Une solution souhaitée par le patronat, qui s’inquiète d’avoir à compenser l’éventuel désengagement de la Sécurité sociale. Le coût pèserait alors directement sur les salariés.
Une utilité qui reste à prouver
L’augmentation des jours de carence est-elle vraiment utile pour alléger les comptes de la Sécurité sociale ? Plusieurs études nous prouvent que rien n’est moins sûr :
- Ces mesures touchent en priorité les arrêts maladie de courte durée, qui représentent à ce jour 61 % des arrêts. Or, ce sont les arrêts maladie de longue durée qui coûtent le plus cher. La Cour des comptes relevait dans un rapport daté de 2019 que « les 3 % d’arrêts de plus d’un an ont suscité 24 % des dépenses (1,8 milliards d’euros) » ;
- Une étude de la DREES de janvier 2015 prouvait quant à elle que « les salariés couverts durant le délai de carence n’ont pas de probabilité plus élevée d’avoir un arrêt dans l’année, mais ont des durées totales d’arrêt maladie significativement plus courtes ». Pire, un effet contre-productif était apparu : « les salariés couverts ont en moyenne 2 jours d’arrêt en moins par an que les salariés non couverts ». L’étude expliquait alors que « la sinistralité plus élevée des salariés non couverts semble a priori contradictoire avec l’hypothèse d’aléa moral. Leurs arrêts plus longs pourraient être dus à la détérioration de leur santé du fait d’une incitation au présentéisme, ou à une incitation à rentabiliser leurs arrêts en les prolongeant (se sachant mieux couverts par la suite).»
Affaire à suivre.