Arrêt de travail : ne plus indemniser les arrêts maladie de moins de 8 jours, délai de carence de 7 jours… découvrez les propositions de la Cour de comptes pour redresser la Sécu

La Cour des comptes vient de rendre public son rapport 2024 sur l’application des lois de financement de la Sécurité sociale. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne contient pas que des bonnes nouvelles : afin de faire baisser le déficit de la Sécurité sociale, elle suggère de revoir l’indemnisation des arrêts de travail.
Les pistes évoquées par la haute juridiction vont, pour la plupart, faire couler de l’encre : augmenter le délai de carence de 3 à 7 jours, ne plus indemniser les arrêts de travail de moins de 8 jours, mettre en place un jour de carence d’ordre public qui ne serait indemnisé ni par l’employeur ni par la Sécu…
On fait le point sur toutes les idées émises par la Cour des comptes pour tenter de faire baisser l’inexorable déficit de la Sécu.
À NOTER
Pour l’heure, aucune solution n’est privilégiée par l’exécutif. Gabriel Attal a expliqué ce matin sur RTL que sa priorité était de lutter contre les arrêts maladie frauduleux et qu’aucune décision n’était prise à ce stade.
Le coût des arrêts de travail a doublé depuis 2017, la faute à qui ?
Le tour de vis annoncé par la Cour des comptes est dû à un fait chiffrable : les dépenses d’indemnisation des arrêts de travail pour maladie du régime général sont passées de 7,7 milliards d’euros à 12 milliards entre 2017 et 2022, soit une brusque augmentation de +56 %.
Les causes de cette augmentation sont multiples :
- Pour la moitié, elle est due au Covid, qui a entraîné l’allègement des contrôles et des procédures, dont l’arrêt des interruptions d’indemnisation au-delà de 3 ans ;
- La hausse du SMIC et des salaires ;
- L’augmentation de la population active ;
- Ou encore l’extension du champ du régime aux indépendants et aux professions libérales.
Pour amorcer la diminution de ces dépenses, la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) applique actuellement deux stratégies, que la Cour des comptes juge insuffisantes :
- la lutte contre les faux arrêts de travail (qui passe notamment par la dématérialisation des attestations de salaires par les entreprises et des arrêts de travail par les médecins) ;
- et un contrôle renforcé des conditions de prescriptions des médecins.
Comment faire baisser les dépenses de la Sécu ?
La haute juridiction estime que deux leviers supplémentaires doivent être activés :
- La règlementation doit être simplifiée car les coûts de gestion coûtent très chers à la Sécu (400 millions d’euro/an) ;
- La répartition de la prise en charge entre l’assurance maladie, les entreprises et les salariés doit être revue. Parmi les pistes évoquées :
- la réduction de la durée maximale d’indemnisation de 3 à 2 ans associée à une meilleure prise en charge des pathologies chroniques,
- arrêter l’indemnisation des arrêts de travail de moins de 8 jours,
- augmenter le délai de carence de 3 à 7 jours,
- mettre en place un jour de carence d’ordre public compensé par une baisse du taux de prise en charge par l’assurance maladie.
Ne plus indemniser les arrêts de travail de moins de 8 jours, porter le délai de carence à 7 jours… zoom sur les mesures proposées par la Cour des comptes
Arrêter tout bonnement d’indemniser les arrêts de travail de moins de 8 jours : il s’agit de l’une des propositions les plus explosives de la Cour des comptes. Si cette solution était retenue, la CPAM ne vous indemniserait que si votre arrêt de travail est supérieur à 7 jours. Une telle mesure permettrait d’économiser 470 millions d’euros.
Seconde hypothèse, porter le délai de carence de 3 à 7 jours pour tous les arrêts de travail, quelle que soit leur durée. Rappelez-vous, pour l’heure, un délai de carence de 3 jours s’applique, c’est-à-dire que vous ne percevez des indemnités journalières qu’au-delà du 4ème jour d’arrêt. Si cette mesure est également appliquée aux affections de longue durée, elle pourrait permettre une économie d’ampleur (945 millions d’euros). Sans modifications des garanties issues des négociations collectives actuelles, qui envisagent souvent le maintien de salaire par l’employeur durant les jours de carence, cette augmentation pèserait lourdement sur les finances des entreprises. Et, dans certains cas, sur les salariés qui ne bénéficient pas d’un maintien de salaire.
Autre hypothèse sur le feu : mettre en place un jour de carence d’ordre public qui ne serait ni indemnisé par la Sécurité sociale, ni par l’employeur. Le Medef est bien évidemment pour cette solution, qui permettrait aux entreprises d’économiser 1 milliard d’euros. Elle entraînerait en conséquence une perte de revenu pour les salariés, et pour la Sécurité sociale. Une telle mesure ne serait envisageable que si les entreprises contribuent – en contrepartie - au rétablissement de l’équilibre financier de la Sécurité sociale. Par exemple, au moyen d’une diminution du taux de prise en charge des indemnités par l’assurance maladie (à 45 % contre 50 % actuellement).