AME : le gouvernement veut (encore) restreindre les soins pris en charge pour les étrangers sans papiers

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AME : le gouvernement veut (encore) restreindre les soins pris en charge pour les étrangers sans papiers

Selon des projets de décret consultés par l’AFP, le gouvernement envisage de réduire la liste des soins de santé couverts par l’AME et de revoir les conditions d’accès pour bénéficier de cette aide. De quoi faire plaisir à la droite et l’extrême droite, à quelques jours d’un vote de confiance à haut risque pour le Premier ministre François Bayrou.

AME : que couvre l’aide médicale de l’État actuellement ?

L’Aide médicale de l’État (AME) est un dispositif qui permet aux étrangers en situation irrégulière et disposant de faibles ressources d’accéder gratuitement aux soins en France.

Pour en bénéficier actuellement, il faut :

  • Résider sur le territoire depuis plus de trois mois sans titre de séjour ;
  • Percevoir des revenus modestes, inférieurs à 10 116 euros par an pour une personne seule en métropole (soit moins de 843 euros / mois).

L’AME offre alors une prise en charge à 100 % des soins médicaux et hospitaliers, sans avance de frais, dans la limite des tarifs de la Sécurité sociale. Ce qui signifie que l'AME ne couvre ni les dépassements d'honoraires, ni les restes à charge. Certaines prestations, comme la procréation médicalement assistée, les cures thermales ou encore les médicaments jugés de faible utilité médicale, en sont également exclues. De plus, les soins considérés comme non urgents – par exemple les interventions de chirurgie réparatrice ou certaines prothèses – ne sont pris en charge qu’après un délai de neuf mois suivant l’admission.

Régulièrement ciblée par la droite et l’extrême droite, l’AME est fermement défendue par le monde de la santé, dans le sens où c’est un dispositif de santé publique, qui protège tous les citoyens.

Les « ajustements » prévus par les projets de décret sur l’AME

Les projets de décrets ont été soumis pour avis au conseil de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) et entendent durcir l'accès à l'AME.

Un panier de soins réduit

Dans le détail, le gouvernement souhaiterait :

  • Exclure la balnéothérapie du panier de soins pris en charge par l’AME. Sachant que les cures thermales sont déjà exclues du dispositif, difficile de savoir de quoi parle ici le Premier ministre.
  • « Soumettre à accord préalable » certains soins aujourd’hui accessibles sans cette condition, après neuf mois de présence sur le territoire : certains actes de kinésithérapie, les lunettes, les audioprothèses, les soins prothétiques dentaires et les transports sanitaires pour des soins programmés non urgents en ville.

Des conditions d’accès plus strictes

L’AME est d’ores et déjà conditionnée aux ressources du demandeur, qui ne doit pas gagner plus de 843 euros par mois. Mais actuellement, les services de l’Etat prennent seulement en compte les ressources des personnes à la charge du demandeur. Désormais, le gouvernement entend prendre en compte les revenus de l’ensemble des membres du foyer dans l’appréciation des conditions de ressources. Autrement dit, si un demandeur de l’AME est en couple avec une personne en situation régulière, les ressources de cette personne seraient prises en compte pour déterminer l’éligibilité du demandeur à l’AME. Une mesure déjà proposée dans un rapport sénatorial en juillet dernier, qui n'avait pas manqué de faire réagir les ONG, dont Women for Women France :

« Cette mesure contraindra des centaines de milliers de femmes en France à obtenir l’autorisation de leur conjoint pour se soigner et forcera des dizaines de milliers de victimes de violences conjugales, de proxénétisme ou de traite des êtres humains à demander l’autorisation de leur agresseur pour accéder à des soins post-violences ».

Un autre décret vise à ajouter à la liste des pièces justificatives à fournir pour constituer le dossier de demande d’AME « la présentation de documents d’identité comportant une photographie ».

Des mesures qui ne remettraient pas en cause le dispositif AME

Le ministère de la Santé assure que « les mesures proposées ne remettent nullement en cause le dispositif de l'AME, mais constituent des ajustements conformes aux recommandations du rapport Evin-Stéfanini ». Paru en décembre 2023, ce rapport avait conclu que l’AME est un dispositif sanitaire « utile, maîtrisé pour l’essentiel, mais exposé à l’augmentation récente du nombre de ses bénéficiaires ».

Si en 20 ans, l’AME a plus que triplé son budget et doublé le nombre de ses bénéficiaires, elle ne représente que 0,5 % des dépenses de santé en France. Par ailleurs, selon une étude de l’IRDES publiée en 2019, seules 51% des personnes éligibles à l’AME en seraient réellement bénéficiaires.

Alors, l’AME va-t-elle subir un coup de rabot ? Rien n’est moins sûr, en raison de la probable chute, le 8 septembre prochain, du Premier ministre Bayrou lors du vote de confiance.

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