Afin d’éviter les ruptures de droits, une proposition de loi souhaite ouvrir la possibilité de toucher sa retraite dès le premier jour

Le 16 janvier dernier, les députés socialistes et apparentés ont déposé une proposition de loi visant à toucher sa retraite dès le premier jour.
Alors que les retards de traitement des dossiers de demande de retraite s’accroissent ces dernières années, il s’agit de mettre en place un bouclier social visant à protéger les assurés impactés, en premier lieu les ménages modestes. Focus.
Des ruptures de ressources de plus en plus fréquentes lors du passage à la retraite
Selon les auteurs de la proposition de loi, on dénombrerait des dizaines de milliers de travailleurs se retrouvant sans aucun revenu au premier jour de leur retraite. En effet, selon l’enquête annuelle de 2019 auprès des caisses de retraite (EACR), 263 000 dossiers d’attribution de minimum contributif (dont les liquidations sont survenues entre 2012 et 2018) n’étaient ainsi pas encore traités en 2019 et n’ont pas fait l’objet d’un versement d’avance.
D’après eux, les réformes intervenues en 2023 en matière de condition d’ouverture et de mode de calcul du minimum contributif ne pourront qu’aggraver ces situations.
Ils ajoutent que si, en 2022, l’administration invoquait 20 000 à 25 000 dossiers traités en retard, induisant une rupture de ressources, les organisations syndicales contestaient ces chiffres et alertaient sur un accroissement de ces situations.
Pourquoi en arrive‑t‑on à de tels retards de traitement des dossiers retraite ? Selon les signataires du texte, ces 20 dernières années, notre régime de retraite a connu de nombreuses évolutions :
- Des rationalisations (fusion des régimes au sein du RSI par exemple) ;
- Certains progrès sociaux comme la prise en compte d’une partie des primes et des indemnités dans le calcul des retraites des fonctionnaires ou encore de la pénibilité ;
- Des réformes majeures étendant la durée de cotisation et l’âge légal de départ à la retraite.
Or, en parallèle, les effectifs de la Sécurité sociale connaissent, depuis 10 ans, une baisse continue, de 6 % entre 2012 et 2022 pour les agents en CDI, non compensée par une hausse marginale des effectifs en CDD.
On constate, par ailleurs, une évolution des profils des assurés vers des carrières de moins en moins linéaires, relevant d’un nombre croissant d’employeurs et de régimes, ainsi qu’une complexification des règles qui rendent plus difficile la reconstitution des carrières pour l’administration.
Avec plus de dossiers, plus complexes, des réformes incessantes et moins d’agents, les caisses de retraite peinent à suivre. Pourtant, en parallèle les démarches visant à préparer sa retraite sont facilitées à travers notamment la dématérialisation des procédures.
Eviter toute rupture de droits en instaurant un bouclier social lors du départ en retraite
Afin de garantir qu’aucune rupture de ressources n’intervienne lors du passage à la retraite, la proposition de loi vise à mettre en œuvre un bouclier social au moment du départ à la retraite.
Ainsi, pour répondre à cet objectif, l’article 1er prévoit que tout assuré ayant demandé son départ à la retraite au moins un mois avant la date de celui‑ci bénéficie, à défaut du versement de sa pension définitive, d’une première pension temporaire dès le mois suivant.
Le montant de ce bouclier social sera calculé sur la base de la dernière simulation de pension du travailleur concerné. Ce faisant, il se rapproche du montant final à percevoir, mais sera quasi systématiquement légèrement inférieur, pour éviter toute demande de remboursement de trop‑perçu.
Ce dispositif s’adresse à tous les travailleurs, qu’ils relèvent du régime de la fonction publique civile et militaire, du régime agricole ou du régime général.
Il ne représente pas une dépense nouvelle pour les organismes de sécurité sociale, mais induira exclusivement des charges mineures de trésorerie et de gestion.
En outre, l’ensemble des néo‑retraités ne seront pas bénéficiaires de cette pension minimale temporaire : seuls seront concernés les assurés ayant demandé la liquidation de leur pension dans un délai ne permettant pas aux caisses de retraite saisies d’assurer la liquidation de leur pension dans le premier mois passé à la retraite, ainsi que les assurés à la carrière complexe, qui requièrent du temps aux mêmes caisses pour calculer la pension due.
De plus, assurer à chaque usager de ne pas avoir de rupture de revenus, au moment du départ à la retraite, en lui offrant une pension temporaire réduira la pression sur les caisses en matière de traitement et de régularisation de ces dossiers. C’est aussi faciliter le travail des agents des caisses de retraite.
Alors que la proposition de loi a été rejetée ce mercredi 14 février en commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, les signataires de la proposition de loi défendront leur texte le jeudi 29 février en séance publique. Affaire à suivre...
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